lundi 25 novembre 2013

Jean-Marie Messier dans le viseur du parquet général

L'avocat général demande vingt mois de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende.



Jean-Marie Messier. - Photo Bertrand Langlois/AFP

Le parquet durcit le ton. En première instance, il avait requis la relaxe pour Jean-Marie Messier, jugé pour des délits présumés au moment des déboires de son ex-société Vivendi Universal entre 2000 et 2002. Changement de pied hier en appel : l'avocat général près la cour d'appel de Paris, Mireille Venet, a proposé la condamnation de l'ex-PDG de Vivendi Universal (VU) à vingt mois de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende. Des réquisitions toutefois en retrait par rapport à la condamnation en première instance à trois ans de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende.

Sur bien des points, Mireille Venet demande la confirmation du jugement de première instance. Et se montre sévère avec les pratiques de l'ex-icône du capitalisme français. «  Il y a un gros souci », ironise ainsi la représentante du parquet : «  la convention de fin de contrat de monsieur Messier a été signée le 1er juillet 2002 alors que cette convention devait être soumise au conseil d'administration qui, lui, ne va se réunir que le 3 ». Cette convention de fin de contrat lui attribuait une indemnité de 18,6 millions d'euros, assortis d'une prime de 1,955 million et de divers avantages en nature. Le conseil d'administration ne validera jamais cet accord et s'en remettra quelques mois plus tard à un arbitrage aux Etats-Unis qui, in fine, donnera raison à Jean-Marie Messier. L'ancien PDG de VU renoncera finalement à l'indemnité prévue pour obtenir l'abandon des poursuites menées contre lui par la Securities and Exchange Commission (SEC).

« Parfaitement conscient »

Mais «  le 1er janvier 2002, Jean-Marie Messier est toujours PDG et salarié de VU. Donc la convention aurait bien dû être soumise au conseil d'administration de la société », martèle l'avocat général. De plus, elle aurait été «  contraire à l'intérêt social de VU » car «  excessive compte tenu du contexte économique pour le groupe ». Or, « Jean-Marie Messier était parfaitement conscient de la situation financière de VU », poursuit-elle, demandant la confirmation de la condamnation en première instance pour abus de biens sociaux.
En revanche, sur le délit de diffusion d'information fausse et trompeuse, l'avocat général ne reconnaît que deux communications trompeuses sur les quatre incriminées. Dans un communiqué daté du 19 décembre 2000 et un entretien aux « Echos » publié le 11 décembre 2000, Jean-Marie Messier affirmait que la dette nette de l'activité communication du groupe (hors Vivendi Environnement) serait nulle début 2001. Or une note transmise début février à Jean-Marie Messier par l'ancien directeur financier, Guillaume Hannezo, évoquait l'estimation d'une dette nette de 1 milliard d'euros environ à fin 2000.
Et le 24 avril 2001, lors de l'assemblée générale, il était fait état d'une dette nette de 3,4 milliards d'euros. Jean-Marie Messier, lors de l'audience, avait reconnu «  un excès de communication… et de passion » mais qui n'a visiblement pas ému Mireille Venet. « Il apparaît que cette communication est inexacte », a fait valoir Mireille Venet, qui se montre tout aussi sévère envers l'ancien directeur financier, selon elle coupable d'un délit d'initié, et a demandé une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis, contre quinze prononcés en première instance, et la confirmation de l'amende de 850.000 euros. Elle a cependant écarté le délit d'information fausse et trompeuse à son encontre. Quant au troisième prévenu, Edgar Bronfman Jr, il serait lui aussi coupable de délit d'initié et Mireille Venet de suggérer à la cour une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis et la confirmation de l'amende de 5 millions d'euros.


Source Par Valerie de Senneville  Les echos

Vingt mois avec sursis demandés pour Jean-Marie Messier

PARIS (Reuters) - Le parquet général a demandé mercredi la condamnation en appel de Jean-Marie Messier pour des délits présumés à la tête son ex-société Vivendi Universal, alors que le ministère public avait demandé la relaxe en première instance.
L'avocat général, Mireille Venet, a proposé vingt mois de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende à l'encontre de l'ex-icône du capitalisme français, une peine inférieure à sa condamnation lors du premier procès.
En 2011, Jean-Marie Messier avait été condamné à trois ans de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende pour "diffusion d'informations fausses ou trompeuses aux marchés" entre 2000 et 2002 et "abus de biens sociaux".
Il avait transformé entre 1996 et 2002 la Compagnie générale des eaux en géant mondial de la communication, avec notamment le rachat de Canal+ et du groupe canadien Seagram, qui contrôlait le studio de cinéma Universal.
Etranglé par les dettes et les pertes, le groupe a ensuite été contraint à une lourde restructuration.
En première instance, les juges avaient qualifié Jean-Marie Messier de "prestidigitateur de dettes", considérant qu'il avait trompé le public et les actionnaires sur l'état du groupe dont il disait qu'il allait "mieux que bien" alors que les créanciers étaient à ses portes.
Ils avaient également retenu contre lui sa tentative d'obtenir sans l'avis préalable du conseil d'administration un parachute doré de 18,6 millions d'euros qualifié d'"abus de biens social".
PARACHUTE DORÉ
Devant la cour d'appel, l'avocat général, qui ne pouvait requérir, le parquet n'ayant pas fait appel, a proposé, outre la condamnation de Jean-Marie Messier, celle de deux anciens dirigeants pour délit d'initié.
Pour Guillaume Hannezo, ex-directeur financier, Mireille Venet a demandé une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis, contre 15 mois prononcés en première instance, et la confirmation de l'amende de 850.000 euros.
Elle a suggéré pour Edgar Bronfman Jr, alors directeur de Warner Music, une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis et la confirmation de l'amende de 5 millions d'euros.
L'avocat général a d'abord reproché à Jean-Marie Messier son "parachute doré", à savoir l'indemnité de 18,6 millions d'euros qu'il avait négociée lors de son départ, bien qu'il ne l'ait en définitive pas touchée.
"Cette convention de fin de contrat a été conclue de mauvaise foi par Jean-Marie Messier, à des fins personnelles, et en sachant qu'elle était contraire à l'intérêt social de VU eu égard à sa situation financière", a-t-elle dit.
Concernant la communication trompeuse, Mireille Venet a seulement retenu contre l'ancien dirigeant un entretien aux Echos en date du 11 décembre 2000 et un communiqué de Vivendi Universal du 19 décembre de la même année.
LES PETITS PORTEURS, "DINDONS DE LA FARCE"
Il y présentait alors le groupe comme net de dettes au 1er janvier 2001 pour ses activités médias et communication.
"Dire que le groupe sera net de dettes au 1er janvier 2001 alors que l'endettement de la branche communications était de 12 milliards d'euros et de 27 milliards pour le groupe est faux", a-t-elle dit.
Les défenseurs de petits porteurs, parties civiles, avaient auparavant demandé mardi la confirmation de la condamnation de Jean-Marie Messier et une indemnisation bien supérieure aux 10 euros accordés par action en première instance, soit 1,2 million d'euros au total.
"Les petits porteurs sont les dindons de la farce du début jusqu'à la fin", a plaidé Me Frédérik-Karel Canoy, représentant des actionnaires individuels.
L'avocat a estimé qu'il s'agissait de la plus grosse faillite jamais enregistrée en France, "un crash financier de 160 milliards d'euros qui a fait un million de victimes".
Il a rappelé que l'action Vivendi, qui était au plus haut du temps de Jean-Marie Messier, à près de 150 euros, était tombée à 8 euros à son départ. Elle vaut aujourd'hui moins de 19 euros.
Frédérik-Karel Canoy a en outre demandé que la société Vivendi, qui est partie civile, soit condamnée civilement en dommages et intérêts.
"La chute du cours a eu des conséquences préjudiciables pour les petits actionnaires, certains ayant placé toutes leurs économies" en actions Vivendi, a-t-il dit.
L'avocat s'appuie sur la sanction infligée au groupe par la commission des sanctions pour manquements et sa condamnation définitive en appel. La cour se prononcera sur ce point dans son jugement.
Edité par Yves Clarisse, nouvelle obs

Lourde condamnation requise contre Jean-Marie Messier

Au terme d'un mois de procès de l'ancien patron de Vivendi, le procureur a requis150.000 euros d'amende et 20 mois de prison avec sursis pour 'abus de biens sociaux' et 'diffusion d'informations fausses ou trompeuses'.



Rebondissement dans le dernier acte du procès en appel de Jean-Marie Messier. La procureure Mireille Venet a requis, ce mercredi 20 novembre, 150.000 euros d'amende et 20 mois de prison ferme contre l'ancien PDG de Vivendi, qui a assisté impassible à ce sévère réquisitoire. Mais, derrière lui, son avocat Francis Szpiner se crispait au fur et à mesure.

C'est un retournement complet par rapport au procès de première instance en 2010, où le parquet avait requis une relaxe générale. 
Lecture politique
Pour l'avocat de l'Association des petits porteurs actifs (Appac), Maître Pascal Lavisse, "on est devant un parquet qui ne s'incline pas devant les instructions. Il faut que justice passe quelque soient les relations que l'on fait jouer".

En clair, les petits porteurs font une lecture politique de ce retournement. Selon eux, l'indulgence du parquet en 2010 s'expliquait par les liens de Jean-Marie Messier avec la Sarkozie. Liens à la fois anciens, puisque J2M avait démarré sa carrière comme conseiller au cabinet d'Edouard Balladur, et nombreux: J2M a embauché dans sa banque d'affaires Jean-Charles Charki, le gendre de Claude Guéant.
Réquisitions sévères
Précisément, la procureure a estimé que J2M devait être condamné pour 'abus de biens sociaux" concernant son golden parachute bien qu'il ne l'ai finalement pas touché. Elle affirme aussi qu'il est coupable de 'diffusion d'informations fausses ou trompeuses', au sujet de déclarations sur la dette de Vivendi parues dans une interview aux Echos, puis reprises dans un communiqué de presse.

Fort sévère, Mireille Venet a aussi requis 850.000 euros d'amende et 10 mois de prison avec sursis contre l'ancien directeur financier de Vivendi, Guillaume Hannezo. Et 5 millions d'euros d'amende et 10 mois de prison avec sursis contre l'ancien vice-président, Edgar Bronfman Jr. Elle estime qu'ils sont tous deux coupables de 'délit d'initiés'. 
Un tribunal plus sévère que le parquet

Bref, la procureure a requis des peines quasiment aussi lourdes que celles infligées en première instance. Car à l'époque, le tribunal correctionnel avait été plus sévère que le parquet: ignorant les réquisitions de relaxe, il avait condamné J2M à 150.000 euros d'amende et trois ans de prison avec sursis.

La Cour d'appel rendra son verdict fin avril. Mais il se présente mal pour J2M après ces réquisitions et un mois d'audiences où la présidente, Mireille Filippini, s'est d'ores et déjà montrée très critique sur plusieurs points, notamment le golden parachute

jeudi 21 novembre 2013

Vingt mois avec sursis demandés pour Jean-Marie Messier

PARIS (Reuters) - Le parquet général a demandé mercredi la condamnation en appel de Jean-Marie Messier pour des délits présumés à la tête son ex-société Vivendi Universal, alors que le ministère public avait demandé la relaxe en première instance.

L'avocat général, Mireille Venet, a proposé vingt mois de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende à l'encontre de l'ex-icône du capitalisme français, une peine inférieure à sa condamnation lors du premier procès.
En 2011, Jean-Marie Messier avait été condamné à trois ans de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende pour "diffusion d'informations fausses ou trompeuses aux marchés" entre 2000 et 2002 et "abus de biens sociaux".
Il avait transformé entre 1996 et 2002 la Compagnie générale des eaux en géant mondial de la communication, avec notamment le rachat de Canal+ et du groupe canadien Seagram, qui contrôlait le studio de cinéma Universal.
Etranglé par les dettes et les pertes, le groupe a ensuite été contraint à une lourde restructuration.
En première instance, les juges avaient qualifié Jean-Marie Messier de "prestidigitateur de dettes", considérant qu'il avait trompé le public et les actionnaires sur l'état du groupe dont il disait qu'il allait "mieux que bien" alors que les créanciers étaient à ses portes.
Ils avaient également retenu contre lui sa tentative d'obtenir sans l'avis préalable du conseil d'administration un parachute doré de 18,6 millions d'euros qualifié d'"abus de biens social".

PARACHUTE DORÉ

Devant la cour d'appel, l'avocat général, qui ne pouvait requérir, le parquet n'ayant pas fait appel, a proposé, outre la condamnation de Jean-Marie Messier, celle de deux anciens dirigeants pour délit d'initié.

Pour Guillaume Hannezo, ex-directeur financier, Mireille Venet a demandé une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis, contre 15 mois prononcés en première instance, et la confirmation de l'amende de 850.000 euros.

Elle a suggéré pour Edgar Bronfman Jr, alors directeur de Warner Music, une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis et la confirmation de l'amende de 5 millions d'euros.
L'avocat général a d'abord reproché à Jean-Marie Messier son "parachute doré", à savoir l'indemnité de 18,6 millions d'euros qu'il avait négociée lors de son départ, bien qu'il ne l'ait en définitive pas touchée.
"Cette convention de fin de contrat a été conclue de mauvaise foi par Jean-Marie Messier, à des fins personnelles, et en sachant qu'elle était contraire à l'intérêt social de VU eu égard à sa situation financière", a-t-elle dit.

Concernant la communication trompeuse, Mireille Venet a seulement retenu contre l'ancien dirigeant un entretien aux Echos en date du 11 décembre 2000 et un communiqué de Vivendi Universal du 19 décembre de la même année.

LES PETITS PORTEURS, "DINDONS DE LA FARCE"

Il y présentait alors le groupe comme net de dettes au 1er janvier 2001 pour ses activités médias et communication.

"Dire que le groupe sera net de dettes au 1er janvier 2001 alors que l'endettement de la branche communications était de 12 milliards d'euros et de 27 milliards pour le groupe est faux", a-t-elle dit.
Les défenseurs de petits porteurs, parties civiles, avaient auparavant demandé mardi la confirmation de la condamnation de Jean-Marie Messier et une indemnisation bien supérieure aux 10 euros accordés par action en première instance, soit 1,2 million d'euros au total.

"Les petits porteurs sont les dindons de la farce du début jusqu'à la fin", a plaidé Me Frédérik-Karel Canoy, représentant des actionnaires individuels.

L'avocat a estimé qu'il s'agissait de la plus grosse faillite jamais enregistrée en France, "un crash financier de 160 milliards d'euros qui a fait un million de victimes".

Il a rappelé que l'action Vivendi, qui était au plus haut du temps de Jean-Marie Messier, à près de 150 euros, était tombée à 8 euros à son départ. Elle vaut aujourd'hui moins de 19 euros.
Frédérik-Karel Canoy a en outre demandé que la société Vivendi, qui est partie civile, soit condamnée civilement en dommages et intérêts.

"La chute du cours a eu des conséquences préjudiciables pour les petits actionnaires, certains ayant placé toutes leurs économies" en actions Vivendi, a-t-il dit.

L'avocat s'appuie sur la sanction infligée au groupe par la commission des sanctions pour manquements et sa condamnation définitive en appel. La cour se prononcera sur ce point dans son jugement.


source: Gérard Bon Edité par Yves Clarisse

mardi 19 novembre 2013

Un avocat et des administrateurs de Vivendi pas très clairs


Quatrième et dernière partie des extraits de l’audience du 6 novembre 2013 devant la 5ème chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Paris qui doit rejuger les accusations d’abus de bien social dont Jean-Marie Messier a été reconnu coupable par le jugement du 21 janvier 2011.

Entre le double jeu des administrateurs et les affirmations douteuses de leur avocat, Vivendi n’a pas le beau rôle au procès en appel de Jean-Marie Messier.

La présidente Mireille Filippini poursuit son examen des conditions pas très claires dans lesquelles Jean-Marie Messier s’est vu attribuer un parachute doré de 18 millions d’euros, qui ne sera jamais validé ni payé, plus ou moins en échange de sa démission.

-         On vous donne un document que vous n’avez jamais lu avant, reprend Eric Licoys dans son récit. On vous dit de le signer, qu’il sera validé en conseil d’administration, tout ça avec cette assurance qu’ont les avocats dans leurs affirmations. Sur cette affaire je leur en veux !

-         Il faut post-dater le contrat pour qu’il soit postérieur à la démission du président, pour que ce ne soit plus une convention réglementée et qu’il n’ait donc plus besoin de l’accord préalable du conseil d’administration. Pratt se doutait bien en tant que juriste, que ce contrat est une convention réglementée soumise au conseil d’administration, aux commissaires aux comptes et à l’assemblée générale des actionnaires. Vous avez entendu parler de ça ?

-         Ils sont arrivés avec leur aura d’avocats réputés, leur image de grand cabinet fiable et ils m’ont fait signer dans la force de précipitation.

-         Il ne faut pas se fier à l’image, ironise la présidente. Mr Viénot dit que vous avez sûrement signé par amitié avec Jean-Marie Messier.

-         Je trouve ça tout à fait scandaleux, lâche Eric Licoys avec une irritation contenue. C’est faux ! C’est lâche ! Ce n’est pas bien, s’offusque-t-il avec conviction.

-         Tout le monde connaît ce contrat mais personne n’en parle au conseil du 3 juillet 2002, c’est ça que je trouve stupéfiant, insiste la présidente. Enfin jusqu’à ce que Pratt leur laisse subodorer que c’est le conseil d’administration dans son ensemble qui risque d’être poursuivi pour abus de bien social. A moins qu’ils aient été tellement peu fiers qu’ils avaient peur d’approuver ce document ? Vous l’avez signé à quelle heure monsieur Messier ?

-         Dans la journée, répond l’ex-PDG.

-         Et vous, monsieur Licoys ?

-         En fin de journée, vers 18h30, répond l’ex-DG.

Citant ce « terminator agreement » comme elle s’amuse souvent à l’appeler, la présidente reprend l’exploration des hypothèses ayant pu motiver sa clandestinité.

-         Ce n’était pas une bonne idée de demander au conseil d’administration son accord, il y aurait eu le problème d’ABS s’il y avait eu une acceptation et il n’aurait probablement pas donné son accord, poursuit la magistrate à l’attention de l’ex-PDG.

-         Ma démission est déjà arrêtée dans la nuit du dimanche au lundi à 3 heures du matin, répond Jean-Marie Messier en répétant une nouvelle fois le récit de son départ. Lundi matin quand j’arrive au bureau, Guillaume Hannezo me parle du problème avec les agences de notation et je lui dit que j’ai démissionné et que je ne m’occupe plus des affaires courantes. Pour moi, lundi matin à 3 heures du matin c’est fini. J’ai juste convoqué le conseil d’administration et annoncé que je démissionnais. Quand je vois deux administrateurs (NDLR Edgar Bronfman et Marc Viénot) qui disent à Licoys que le contrat est exactement ce qu’on a négocié, puis le laissent être mis en examen en disant que ce n’était pas une instruction de le signer, c’est scandaleux ! Quelle que soit votre analyse et l’analyse juridique, je n’étais plus président et je n’ai fait aucun acte de président. Je ne veux pas payer pour les conneries, pardons les erreurs des avocats !

-         Pourtant vous en avez plein, lui fait remarquer la présidente en désignant les trois avocats de l’ex-PDG : maîtres Francis Szpiner, Bernard Casanova et Julien Visconti.

-         Il y a une date que je ne peux pas oublier, c’était à New York le 11 septembre 2002, un an après les attentats, poursuit-il. Fourtou me propose un rendez-vous dans un hôtel de New York où il me dit « Jean-Marie, nous allons décider d’aller à l’arbitrage, prépare-toi, prends un avocat ».

-         Vous avez accepté l’arbitrage, vous avez eu raison, il vous a été favorable.

-         Le 3 juillet, il aurait suffit que le conseil d’administration dise « non, on n’approuve pas » et je n’avais rien à faire, j’étais dans la panade. Mais peut-être que nombre d’administrateurs étaient gênés par leur position, le courage et la duplicité ne sont pas équitablement répartis.

-         Etant donné que vous aviez toujours été contre les parachutes dorés, voilà que vous en demandez un de 18 millions d’euros, relance la magistrate.

-         Ce n’était pas un parachute doré, je n’en avais pas, insiste l’ex-PDG.

-         C’est quand même doré, appuie la présidente.

-         Non, un parachute c’est quand on négocie avant, en position de force.

-         Vous ne trouviez pas que c’était un peu beaucoup ? Vous n’ignoriez pas que ça allait faire du bruit. Vous n’étiez quand même pas dans le besoin ?

-         J’ai toujours investi mon argent dans Vivendi, y compris mon bonus de 2001 réinvesti en actions Vivendi le 26 avril 2002. J’étais laissé sans rien, victime d’une campagne de lynchage médiatique difficile à supporter, il me paraissait normal de défendre mes droits. Il y avait un document soumis au conseil d’administration qui pouvait le changer ou pas, il n’existe qu’après la décision du tribunal de New York qui confirme l’arbitrage. Bien sûr que le montant est choquant, il apparaît colossal.

-         Et il n’est pas prévu au contrat de travail.

-         Madame, regardons la réalité. Je suis chassé, je suis humilié, on me propose une transaction qui est pour moi une façon de reconnaître l’honorabilité de ce que j’ai fait pendant huit ans. Que ce chiffre apparaisse énorme, mon père est comptable et je sais que cela représentait plusieurs vies de salaire de mon père. Oui c’est énorme, considérable, je ne vais pas dire le contraire. Mais il y a clairement un préjudice énorme qui m’a été causé. Il eut été normal que le conseil d’administration de Vivendi e décide souverainement. Il s’en est remis à l’arbitrage américain qui a considéré que le contrat était fondé et que pour une société comparable ce n’était pas choquant.

-         Votre contrat vous donnait quand même certains avantages, rappelle la magistrate.

-         On n’est plus dans la fin de contrat, on est dans les dommages et intérêts, intervient maître Spiszner, qui semble ravi de sa trouvaille.

-         Aucun contrat ne peut prévoir de réclamer à l’avance des dommages et intérêts, tempère la présidente. Pourquoi avez-vous accepté un accord avec la SEC ?

-         Premièrement car il n’y avait aucune reconnaissance de culpabilité, seulement une sanction monétaire d’un million de dollar et l’abandon de toutes créances quelle que soit leur nature vis-à-vis de Vivendi. Deuxièmement j’ai posé la question aux avocats de savoir combien me coûterait un procès et on m’a dit que ça allait durer des années à plusieurs millions de dollars par an.

-         Oui mais vos frais vous sont pris en charge.

-         Je n’aurais pas eu les moyens de me défendre seul.

-         Vous avez donc eu une amende civile d’un million de dollars et une restitution d’un million de dollars, avec une restitution aussi de 148 000 $ pour Guillaume Hannezo, ainsi qu’une interdiction d’être administrateur d’une société cotée pendant dix ans.

-         Oui, qui se termine fin 2013, dans deux mois.
Après l’interruption de fin de semaine, prolongée par le jour férié du lundi 11 novembre, la suite de l’examen des accusations d’abus de bien social reprendra mardi 12 novembre, avec notamment l’audition d’Edgar Bronfman, héritier de l’empire canadien Seagram propriétaire des Studios Universal qui a fusionné avec Vivendi.

Source:  Gilles Pouzin

La chute de Vivendi racontée par le propriétaire d'Universal


Selon le milliardaire américain Edgar Bronfman Jr, qui avait vendu Universal à Vivendi, le groupe aurait fait faillite si Jean-Marie Messier était resté à sa tête.

Edgar Bronfman Jr et son avocat Goerges Kiejman en 2010 lors du procès en première instance (Reuters)

"Quand vous perdez autant d'argent, c'est important d'avoir le sens de l'humour", justifie Edgar Bronfman Jr. En effet, le milliardaire a tendance à illustrer son récit par des proverbes américains qui dérident l'assistance.

L'héritier de la famille Bronfman est la guest star du procès en appel de Jean-Marie Messier, ouvert depuis fin octobre. C'est le plus grand des prévenus, dépassant tout le monde d'une tête. C'est le seul qui ne parle pas français, et il a donc un peu de mal à suivre les débats parfois confus. Surtout, c'est de très loin le plus riche, ce qui lui autorise un certain franc parler, et accessoirement d'être accompagné d'un staff important: trois interprètes et au moins autant d'avocats, dont le prestigieux Georges Kiejman, même si ce dernier a tendance à s'assoupir durant les débats...  

Le début de la chute

Venu exprès de New York, il a raconté comment sa famille, qui était propriétaire d'Universal, a vendu la société à J2M en 2000, devenant ainsi le premier actionnaire de Vivendi. Surtout, il a expliqué pourquoi il a voulu mettre à la porte Jean-Marie Messier en 2002.

Pour lui, la chute a commencé mi-décembre 2001: "M. Messier a alors déclaré que l'exception culturelle française était morte. Puis deux jours après, il a dit ne pas avoir dit ça".
Puis, début janvier, J2M a vendu des actions d'auto-contrôle alors que le groupe avait dit avant qu'il ne vendrait pas ces actions. Dès lors, "le marché perdait confiance en la crédibilité de Jean-Marie Messier". 

"Messier devait partir"
Face à un cours de bourse qui n'en finit pas de chuter, Edgar Bronfman Jr tente un putsch lors du conseil d'administration du 24 juin 2002, mais en vain. Le lendemain, un des administrateurs, Serge Tchuruk, lui propose un deal: J2M deviendrait président du conseil d'administration, tandis qu'Edgar Bronfman Jr deviendrait directeur général.

Mais le canadien refuse: "j'ai dit à M. Tchuruk que si M. Messier restait président, il serait toujours aux affaires. Or les administrateurs américains n'avaient plus confiance en lui. Et les marchés avaient décidé qu'il devait partir". 

Menace de faillite

Finalement, J2M, lâché par les administrateurs français, démissionne. Se pose alors la question de ses indemnités. Edgar Bronfman Jr est favorable à ce qu'on lui verse le golden parachute de 20 millions d'euros qu'il réclame: "j'avais gagné la guerre pour son départ. Et c'était l'intérêt du groupe de lui verser cet argent. Cela représentait seulement un millième de la capitalisation en bourse. Il valait mieux lui payer cela que de laisser Vivendi Universal échouer. Car Vivendi Universal n'aurait pas survécu deux mois si rien n'était fait. Si M. Messier était resté, il n'y aurait plus eu de cours de bourse du tout. Car les banques ne nous auraient pas prêté d'argent".

Or, à cette époque, le groupe avait besoin de nouveaux prêts pour satisfaire les agences de notation, qui menaçaient de dégrader la note de la dette. "Nous aurions été en faillite à cause de cela". Toutefois, "la valeur des actifs a toujours été très supérieure à celle de la dette", assure-t-il. 

Deux milliards de pertes

Quant au montant du golden parachute, J2M demandait à avoir autant qu'Edgar Bronfman Jr. Une comparaison que l'intéressé trouve "complètement déplacée, odieuse et offensante". Selon lui, "M. Messier n'a pas bien dirigé Vivendi Universal. Tandis que j'avais confié à Vivendi Universal une société qui fonctionnait très bien, et renoncé à un job que j'aurais pu garder 10 à 20 ans. C'est très différent!".

Au final, l'héritier estime que la chute du cours a fait perdre à sa famille "probablement deux milliards par rapport au plus haut". A l'énoncé du chiffre, un frisson a parcouru l'assistance .....

Source: Jamal Henni 

Exclusif: accord secret entre Vivendi et Jean-Marie Messier

Le groupe, officiellement fâché avec son ancien dirigeant, paye discrètement les frais d'avocat de J2M dans la procédure de 'class action' intentée par des actionnaires américains.


Jean-Marie Messier et sa compagne à New York à l'automne 2009 durant les audiences de la 'class action' (Reuters)

Officiellement, Vivendi est très fâché contre Jean-Marie Messier. Par exemple, dans le procès pénal contre l'ex-PDG qui se tient en ce moment devant la cour d'appel, Vivendi siège sur le banc des victimes. "Dans ce procès, Vivendi est partie civile, du côté des actionnaires et contre Messier", se flattait en 2010 le président du conseil de surveillance Jean-René Fourtou.

En réalité, la fâcherie a discrètement pris fin depuis déjà plusieurs années. Le groupe et son ancien dirigeant ont même secrètement conclu un accord en juin 2007 concernant les frais d'avocats de J2M.

Cet accord stipule que Vivendi prend à sa charge tous les frais d'avocats dans la procédure collective (class action) menée par des actionnaires américains aux Etats-Unis. L'accord inclut aussi le procès intenté à New York par Liberty Media, le groupe du magnat américain John Malone. Et, selon un accord similaire, Vivendi a aussi pris en charge les frais d'avocats dans la class action de Guillaume Hannezo, l'ancien bras droit de J2M. 

173.000 euros par mois de frais d'avocat

Interrogé, Vivendi refuse aussi de dire combien d'argent le groupe a ainsi versé. Mais les frais d'avocats de J2M dans la class action s'élèvent sans doute à des millions de dollars -voire des dizaines de millions.

En effet, la class action est une procédure complexe et surtout longue -elle dure depuis onze ans. Et J2M avait choisi un cabinet d'avocats prestigieux, King & Spalding, qui compte aussi pour clients Coca Cola, General Electric, Google, IBM...  On sait qu'au printemps 2010, les frais d'avocat de J2M refacturés par King & Spalding à Vivendi s'élevaient 173.000 dollars par mois en moyenne... 

Une banque d'affaires très profitable

Jean-Marie Messier aurait donc eu un peu de mal à payer seul ces frais d'avocats. Aujourd'hui, ses revenus proviennent de son activité de banquier d'affaires, qu'il a lancée après son départ de Vivendi. Lors du procès en première instance, il avait déclaré des revenus de 25.000 euros par mois. Le 28 octobre, lors de l'ouverture du procès en appel, il a porté la somme à 30.000 euros par mois, et y a ajouté une partie variable en fonction des résultats de sa banque d'affaires, qu'il a chiffrés à un million d'euros en 2012.

En réalité, certaines années ont été bien meilleures. En effet, d'autres chiffres ont été rendus publics lors d'un procès intenté contre J2M par Fatine Layt, son ancienne associée dans sa banque d'affaires. Selon elle, Messier Partners LLC, la branche américaine de cette banque d'affaires, a reversé 8,4 millions d'euros de profits à J2M au titre de l'année 2005. Et Fatine Layt estimait ses dividendes à 9 millions de dollars pour 2006... 

250 millions d'euros de frais d'avocats

Jusqu'en 2010, les frais d'avocats de Vivendi comme de Jean-Marie Messier ont été pris en charge par des assurances. Mais ces fonds ont été quasiment épuisés dès 2007, d'où la nécessité de trouver une autre solution.

Si Vivendi a toujours honoré les factures des avocats de Guillaume Hannezo, le groupe a revanche suspendu en mars 2010 les paiements au cabinet de J2M. Furieux, celui-ci avait alors porté plainte mi-décembre 2010 contre le groupe devant la cour suprême de l'Etat de New York (la plainte est disponible ici). Mais, moins d'un mois plus tard, l'affaire fut réglée avant même d'être jugée, les parties ayant visiblement trouvé un accord amiable. 

Au total, les frais de procédure déboursés par Vivendi dans cette class action (essentiellement pour payer les propres avocats du groupe) ont été chiffrés à 250 millions d'euros par le président du conseil de surveillance Jean-René Fourtou lors de l'assemblée générale d'avril 2010.

Critiques en public

Interrogé, Vivendi refuse d'expliquer pourquoi il a payé les frais d'avocats de J2M. Mais on peut supposer que l'intérêt du groupe était que J2M n'accable pas Vivendi dans cetteclass action, mais que J2M soit au contraire solidaire -ce qui s'est effectivement passé.

Néanmoins, cet accord détonne avec l'attitude publique des dirigeants de Vivendi, très critiques à l'égard de J2M (cf. ci-contre). En particulier, Jean-René Fourtou fera tout pour ne pas verser d'indemnités de départ à son prédécesseur. En 2003, il engagera une procédure d'arbitrage sur ce point, où il affrontera le cabinet King & Spalding, c'est-à-dire exactement le même cabinet qu'il paiera quatre ans plus tard...

Enfin, Vivendi refuse aussi d'indiquer si le groupe a pris ou non en charge les frais d'avocat de son ex-PDG dans d'autres procédures, même si cela paraît peu probable.

Interrogé à plusieurs reprises, Jean-Marie Messier n'a pas répondu.

Source: bfmtv

lundi 18 novembre 2013

Un moment d’humanité éclaire le procès Vivendi


La présidente de la 5ème chambre correctionnelle de la cour d’appel de Paris poursuit l’examen des abus de biens sociaux reprochés à Jean-Marie Messier. Suite des extraits de l’audience du 6 novembre 2013.

La présidente Mireille Filippini reprend les événements de ce début d’été 2002. « Le 27 juin les administrateurs français se réunissent dans les bureaux d’Alcatel. Ils décident que vous devez démissionner et mandatent messieurs Friedmann et Lachmann pour vous le dire. Le 28 juin à midi, monsieur Friedmann prend contact avec vous et vous rencontre l’après-midi avec Mr Lachmann. Le 29 juin vous les appelez, selon leurs déclarations, en demandant d’être traité honorablement, comme Mr Bronfman en 2001 ».
-         Comme souvent dans un putsch, vous êtes le dernier informé, répond Jean-Marie Messier. Le mercredi, quand Mr Bronfman demande ma révocation, elle est rejetée par 9 voix contre 5. Ma réaction à la sortie du conseil est de dire « on se remet au travail ». Je suis loin de savoir qu’un premier contact pour me remplacer a été pris avec Jean-René Fourtou depuis le mois de mai.
-         Le 25 juin il y a eu cette crise avec la note d’audit de Goldman Sachs assez pessimiste.
-         Tous les administrateurs américains votaient en bloc ma révocation, tous les administrateurs français votaient la confiance, rappelle Jean-Marie Messier. Qu’il y ait eu une crise de confiance à mon encontre, je ne vais pas vous dire le contraire. Que cette crise ait été instrumentalisée et amplifiée par les médias, je ne vais pas dire le contraire. Mais je croyais à ce que je faisais, c’est pourquoi je voulais que les actionnaires décident de mon sort en AG. La note de Goldman Sachs n’était pas un audit mais un « scénario ». Il y avait quatre scénarios et celui du management. Dix ans après, ce qui s’est passé est intermédiaire entre celui du management et l’un des scénarios de Goldman Sachs.
La magistrate suit l’ex-PDG dans son récit pour le ramener à ses questions. « Mr Viénot dit qu’il soutient les mesures prises par Jean-Marie Messier. Mr Dejouany aussi dit que les projets de Jean-Marie Messier sont une étape dans la bonne direction. Seul Mr Arnault avait démissionné peu de temps avant. Pourquoi avoir changé d’avis le 29 juin à midi ?

-         Je n’ai pas envie de commenter une décision qui appartient à Bernard Arnault, précise d’emblée l’ex-PDG, comme par prudence. J’ai appris quelques heures après la visite de Lachmann que Fourtou avait été contacté et j’ai compris la duplicité d’administrateurs qui ont voté ma confiance le 25 dans l’attente d’un accord de mon successeur pour tirer le tapis. Guillaume Hannezo est venu me parler dans l’après-midi de l’attitude des banques liées aux conjurés, des agences de notations. Après… c’est difficile. Sa gorge se serre. Les mots sortent plus lentement, comme assourdis par le poids d’un souvenir encore douloureux. C’est, tempête sous un crâne, lâche-t-il d’une voix presque étouffée.

A ce moment, les mots prononcés par Jean-Marie Messier prennent une autre signification qu’en titre de son livre. On n’imagine plus seulement cette « tempête sous un crâne » comme un exercice lointain d’autobiographie biaisée par la pression des procès ; on la partage un peu à travers l’évocation du passage à vide qui l’a visiblement marqué.
Même si les conditions de cet épisode pénible peuvent paraître décalées, au commun des mortels qui n’a pas vécu son destin flamboyant, l’audience s’est faite plus silencieuse, attentive aux cicatrices morales que dévoile l’ex-PDG derrière son masque de totem du capitalisme arrogant.
Les blessures, la solitude, le découragement face à une partie de son univers qui s’écroule, chacun dans l’assistance connaît leur réalité, pour l’avoir vécue ou croisée. Chacun soupèse combien le sentiment de détresse peut frapper d’innombrables personnes de toutes conditions, à tout âge, dans des situations les plus diverses. Même Jean-Marie Messier.

Ce moment de vérité éclaire le procès d’un petit supplément d’âme. Quelles que soient ses responsabilités et sa culpabilité, en partie établies par la justice, ou l’innocence qu’il est venu plaider en appel, Jean-Marie Messier, dans cet instant de fragilité, regagne la dignité qui lui est due en tant qu’être humain.

Les projecteurs s’éloignent aussi un peu de l’individu pour éclairer l’ensemble de la scène dont il joue le premier rôle. En brisant la carapace d’égo de l’ex-PDG, cette audience rappelle en effet au public que ce procès dépasse l’enjeu individuel de sa condamnation, pour s’inscrire dans l’effort plus ambitieux d’une société luttant contre ses propres dérives. Des puissants qui s’égarent ou dérapent, au détriment du bien commun dont ils ont la charge, il y en a eu avant lui et il y en aura d’autres après.

Cette affaire Vivendi symbolise-elle, plus ou moins que d’autres, les dérives de son époque ? Comparaison n’est pas raison. Les procès passent et la nature humaine demeure, avec ses facettes plus ou moins obscures. A travers ces procès de la cupidité, exercices de vérité presque contrits, notre société examine en réalité sa propre conscience collective. Et par moment, comme aujourd’hui au procès de Jean-Marie Messier, les acteurs principaux retrouvent devant la justice une partie de la dimension humaine qu’ils avaient perdue dans leur flamboyance.

Source: Publié le 14 novembre 2013 par Gilles Pouzin

jeudi 14 novembre 2013

Jean-Marie Messier : Vivendi avait donné des informations partielles mais essentielles


Pour clore son examen de la manipulation de cours de Vivendi lors de ses rachats d’actions de septembre 2001, la présidente poursuit son audition de Jean-Marie Messier. Dernier extrait de l’audience devant la 5ème chambre correctionnelle de la cour d’appel de Paris, le 5 novembre 2013.




A l’audience, Jean-Marie Messier se déclare seul responsable, devant la 5ème chambre correctionnelle de la cour d’appel, en novembre 2013.

« Revenons à nos moutons, les rachats de titres », enchaîne la présidente de la cour.

-         Oui, après ce grand débat d’une technicité que j’aime bien, vous avez dit que j’avais évoqué le cours de 49,5 €, c’était juste pour donner cette info sans conséquence, explique Jean-Marie Messier.

-         Pourquoi vous ne dites pas que Vivendi rachète des actions depuis le 17 septembre ? Vous dites beaucoup de choses dans plusieurs communiqués mais vous passez toutes vos opérations de rachat d’actions sous silence, ce qui m’a surpris.

-         Une conférence de presse de deux heures, pardonnez-moi de le dire, mais c’est zéro info, ça n’a aucune portée. J’aurais aimé reprendre le graphique, j’aurais voulu essayer de vous expliquer. On m’accuse par délit d’égo d’avoir fait artificiellement monter le cours à 50 € le 25 septembre.

-         Oui, entre autres.

-         C’est une journée où, entre le conseil d’administration, le déjeuner avec les administrateurs, la conférence de presse et la réunion avec les analystes financiers, je ne suis pas en contact avec mes équipes. J’ai fait beaucoup de choses égotiques sans doute, mais pas celle-là. 
L’ex-PDG reprend la fameuse démonstration par l’absurde selon laquelle il s’y serait pris autrement pour manipuler le cours, ce qui prouve bien qu’il ne l’a pas manipulé. 
« Dire que j’ai fait maintenir le cours à 50, ça n’a pas de sens. »

-         Venons-en à la communication, enchaîne la magistrate. Pourquoi vous ne communiquez pas pour dire « suite aux attentats on a été obligés de racheter nos propres actions » alors qu’au moment où vous annoncez la vente de BSkyB vous dites que les fonds seront alloués au désendettement et au programme de rachats d’actions. Vous annoncez le 25 septembre que le conseil d’administration a autorisé l’annulation de titres à hauteur de 3% du capital, que le cours est attractif autour de 49,50, qu’une partie des titres à annuler a déjà été rachetée et qu’une autre doit l’être ultérieurement. Vous parlez seulement d’annulation, pas de régulation.

-         Une première chose est qu’on n’a aucune obligation de faire un communiqué de presse pour annoncer des rachats d’actions, se retranche Jean-Marie Messier. On a fait ce communiqué parce qu’on a voulu que ce soit su.

-         Oui mais vous ne parlez pas du contexte.

-         Il nous a semblé négatif de dire qu’on arrivait à la limite de notre programme de rachat de 10% des actions.

-         C’est vrai, tout le monde aurait compris que l’action n’avait tenu à ce niveau que grâce aux achats passés. Selon les enquêteurs de la COB interrogés, l’effet d’annonce de l’annulation d’actions était très positif, mais l’absence d’annulation des actions après cette annonce constitue une infraction au règlement général car l’information doit être exhaustive, claire et non trompeuse, sinon on doit informer le marché du changement d’avis.

-         Vous citiez hier Michel Prada qui disait « c’est positif pour l’actionnaire ». Je prends l’analogie d’un gâteau, si je fais moins de parts, en annulant des actions, les parts qui restent ont plus de gâteau. Quand on apporte ces titres en paiement de USA Networks, j’agrandis le gâteau, d’où le choix de ne pas annuler les actions mais d’augmenter la taille du gâteau. Bien qu’elle soit favorable à l’actionnaire, cette annonce n’a pas eu d’impact. Je voudrais insister sur le fait qu’on n’avait aucune obligation de faire ce communiqué de presse, mais comme on approchait de notre limite de 10% on voulait le faire.

-         Pourquoi ne pas l’avoir dit ? Si on fait un communiqué de presse c’est bien pour annoncer les nouvelles importantes ?

-         Rendre public ce programme alors qu’on n’avait aucune obligation de le faire faisait partie de notre stratégie de dire « Attention, Vivendi Universal est attentif à la régulation de son cours et a les moyens de le faire ».

-         Les victimes sont aussi ceux qui n’ont pas vendu dans cette période car ils ont été influencés par un communiqué de presse leur annonçant que le gâteau serait plus gros. Mr Prada a écrit au procureur « Jean-Marie Messier a insisté sur l’annulation des actions et la relution ».

-         Oui, cela correspondait à notre décision favorable aux actionnaires. En novembre décembre, quand s’est présentée l’opportunité d’acheter USA Networks pour apporter la dernière pierre à ce groupe de média, nous avons jugé qu’il serait plus intéressant pour les actionnaires d’apporter les titres en paiement de ce rachat que de les annuler.

La fin de l’audience est consacrée aux questions des avocats et parties civiles orchestrées par la cour. Certaines méritent davantage d’être mentionnées pour leur valeur informative sur la forme que sur le fond.

-         Est-ce que des groupes qui n’ont pas racheté leurs actions après les attentats de New York ont connu une spéculation sur leurs actions ? interroge ainsi Didier Cornardeau, président de l’Association des petits porteurs actifs (APPAC).

-         La question est inopérante et inadéquate, il n’y avait pas d’équivalent en France d’un groupe aussi américain que Vivendi Universal, balaye Jean-Marie Messier avec dédain. Nous n’avons pas respecté la présomption de légitimité des rachats d’actions ce qui nous met la charge de la preuve que ces rachats étaient bien légitimes. La règle impérative d’abstention dans la quinzaine précédent les résultats a été assouplie à condition de donner une indication au marché de résultat provisoire, nous l’avions donnée le 23 juillet sur les médias, pas sur Vivendi Environnement comme j’en ai pris la responsabilité. J’ai pris la décision de ces rachats d’actions, il est normal que le régulateur se soit penché dessus et la lettre de l’AMF résume le mieux qu’il n’y a pas eu de manipulation de marché car l’information donnée était « certes partielle mais essentielle ».

-         Cette règle est là pour empêcher un délit d’initié, pas les manipulations de cours, corrige la présidente Filippini

Source: Publié le 13 novembre 2013 par Gilles Pouzin
Dessin: Yanhoc

La mémoire sélective des administrateurs de Vivendi


La cour est passée à l’examen des abus de biens sociaux (ABS) dont est accusé Jean-Marie Messier. Contrairement au chef d’accusation précédent, l’ex-président de Vivendi a été reconnu coupable de ce délit par le jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 21 janvier 2011 qui l’a condamné à trois ans de prison avec sursis. Extraits de l’audience du 6 novembre 2013.



Le premier sujet d’ABS porte sur le parachute doré octroyé dans des conditions troubles à l’ex-président de Vivendi lors de son éviction. Ce beau cadeau de 18 millions d’euros n’était pas prévu lors des prises de fonction de Jean-Marie Messier, même dans le contrat de travail occulte qu’il avait discrètement signé avec des sociétés américaines du groupe Vivendi Universal. La présidente pointe des irrégularités de ce contrat, notamment le fait qu’il aurait dû faire l’objet d’une convention réglementée et nécessitait une double signature d’un dirigeant autre que son bénéficiaire, en plus de son subalterne des ressources humaines, dans la mesure où il engageait la société.

-         C’est une procédure classique aux Etats-Unis d’être mandataire social de Vivendi Universal et salarié de Seagram, comme l’étaient d’autres collaborateurs américains, estime l’ex-PDG.

-         Le comité des mandataires sociaux fait référence à votre contrat de travail et celui de Mr Bronfman, poursuit la magistrate. Il fait état de votre rémunération de 1,3 million de dollars ainsi qu’une prime de 200% à 300% de votre salaire, proportionnelle à l’Ebitda (earnings before interest taxes, depreciation and amortization), et il prévoit en plus plus au titre des frais de mission que la société prenne en charge des dépenses selon les dispositions de votre contrat de travail. Bernard Arnault (NDLR patron de LVMH administrateur de Vivendi à l’époque) indique qu’il n’a su que Jean-Marie Messier avait un contrat de travail américain qu’après sa démission. Mr Tchuruk (NDLR à l’époque administrateur de Vivendi et patron d’Alcatel) a aussi dit qu’il n’avait jamais vu votre contrat de travail américain, pas plus que celui de Mr Bronfman. Qui était au courant ? Pas les administrateurs, il n’en est pas fait état dans les comptes rendus du conseil d’administration.

-         Non seulement il existait comme document préparatoire du comité des mandataires sociaux mais il avait fait l’objet de discussions au moment de la fusion (NDLR, par le rachat fin 2000 du groupe de communication canadien Seagram, qui possédait les studios de cinéma Universal et le label Universal Music).

-         Avec qui ? interroge la magistrate. Mr Bronfman ? (NDLR, le président actionnaire familial de Seagram bénéficiaire de la fusion) Mr Lescure ? (NDLR, le président de Canal plus, aussi bénéficiaire de sa fusion au sein du groupe de médias).

-         Surtout les ressources humaines et les services généraux, explique Jean-Marie Messier. Vous avez rappelé le souhait que j’avais exprimé de ne pas avoir de parachute doré.

-         Oui, car vous étiez contre, comme semble-t-il vous l’aviez exprimé dans un livre que je n’ai pas lu, précise la présidente.

-         Il eut été facile de dire à la signature de mon contrat d’appliquer les mêmes termes que dans celui de Mr Bronfman, poursuit Jean-Marie Messier. Mais un termination agreement n’est pas un parachute doré, c’est une transaction, nuance-t-il.

-         Vous y faites constamment référence au contrat de travail, tempère la magistrate, vous dites avoir droit à cette indemnité car vous démissionnez pour juste motif, on est quant même dans le contrat de travail, sauf qu’il ne prévoit pas cette indemnité. Dans une déposition, Mr Lachmann (NDLR à l’époque administrateur et patron de Schneider), va dire à propos de vous « on lui avait demandé de convoquer un conseil d’administration mais il ne voulait pas car il avait peur d’une révocation car nous étions convaincus qu’il devait démissionner pour le bien de la société ». Or, qui dit révocation dit « pas de parachute ».

-         Les administrateurs ont une faculté de mémoire sélective, s’offusque Jean-Marie Messier. C’est un peu fort de dire qu’ils n’étaient pas au courant alors que l’on a parlé explicitement de ce contrat de travail au comité de rémunération. Un certain nombre d’administrateurs ont l’expérience pour savoir que dans les sociétés américaines c’est une situation usuelle d’être mandataire social avec un contrat de travail. Ce que vous dites de Mr Lachmann, malgré la mémoire sélective, relève qu’il n’a jamais été dans l’intention des administrateurs d’évoquer ma révocation. Ils viennent me voir en disant « on souhaiterait que tu démissionne et tu seras traité honorablement ».

-         Mr Friedmann dira « nous ce qu’on voulait c’était sa démission ».

-         Je ne vais pas m’expliquer sur tout, mais c’est ce que j’ai entendu de Jacques Friedmann, Henri Lachmann ou Marc Viénot.

-         Quand vous envoyez des mails à messieurs Viénot et Bronfman, qui représentaient les administrateurs français et américains, c’est vous ou eux qui demandez à ce que vous soyez traité honorablement ?

-         C’est eux. La seule question qui fait débat est que je ne suis pas d’accord avec ce qu’il se passe. Je crois à Vivendi Universal et à ce que je fais. Je veux convoquer une assemblée générale afin d’être jugé par les actionnaires projet contre projet.


Source: Publié le 13 novembre 2013 par Gilles Pouzin
photo: Les différents volets de l’affaire Vivendi n’ont pas fini leur parcours judiciaire devant les tribunaux. (photo © GPouzin)

Vivendi: Jean-Marie Messier règle ses comptes avec la presse


Lors de son procès devant la cour d'appel de Paris, l'ex-PDG de Vivendi a expliqué ses déboires par une "campagne de lynchage" menée par le quotidien 'Le Monde'.

Assis sur le banc des accusés depuis deux semaines à l'occasion de son procès en appel, Jean-Marie Messier se défend pied à pied. L'ex-PDG de Vivendi admet quelques rares erreurs, mais pointe aussi d'autres responsables de ses déboires, notamment la presse. Il assure avoir subi "une campagne de lynchage médiatique légèrement difficile à supporter. Les journalistes adorent détruire ceux qu'ils ont mis la veille sur un piédestal". 



J2M dénonce en particulier "une campagne de lynchage médiatique du journal Le Monde". Le quotidien du soir "nous bassinait tous les trois jours avec une 'une' sur des points des comptes [de Vivendi] qui se sont avérés parfaitement erronés". 

"Le Monde, c'est moi"

Jean-Marie Messier dénonce aussi les liens entre le quotidien du soir et Pierre Lescure, le patron de Canal Plus. La chaîne cryptée était un actionnaire minoritaire du quotidien, ce qui permettait à Pierre Lescure d'être membre de son conseil de surveillance. 

J2M raconte ainsi qu'en avril 2002, lorsqu'il a convoqué Pierre Lescure pour lui signifier son départ, celui-ci a décalé le rendez-vous en début d'après-midi afin de pouvoir arriver avec la dernière édition du Monde. J2M affirme: "Pierre Lescure est arrivé avec pour seul document Le Monde, dont la 'une' voulait me mettre en difficulté, en me disant: 'tu vois, Le Monde c'est moi. Maintenant, commençons la conversation...'".

"Messier est un homme mort"

Mais, mardi 12 novembre, J2M a fait encore mieux. Il a fait citer comme témoin Denis Jeambar, qui dirigea l'Express de 1996 à 2006, à une période où l'hebdomadaire appartenait à Vivendi. 

Le journaliste a lui aussi tiré à boulets rouges sur Le Monde. "Nous avons subi une guerre permanente, un harcèlement injuste. J'ai même été traîné dans la boue dans un éditorial". 

Selon lui, cette animosité était dûe au fait que Le Monde avait tenté -en vain- de racheter L'Express en 1997. "cela n'a pas aboutit car Le Monde n'avait pas les moyens de racheter L'Express, qui valait 500 millions de francs [76 millions d'euros]. Le Monde et ses dirigeants ont essayé par tous les moyens de pression pour me convaincre, puis pour m'écarter". 

Denis Jeambar rapporte des propos qu'aurait tenus Jean-Marie Colombani, à l'époque directeur du quotidien du soir: "si Jean-Marie Messier ne nous donne pas L'Express, Jean-Marie Messier est un homme mort". 

Un compte à régler
Au passage, Denis Jeambar assure que J2M était un actionnaire exemplaire: "de 1997 à 2002, jamais Jean-Marie Messier ne m'a jamais demandé quoi que ce soit, ou reproché quoi que ce soit. J'ai fait mon travail en toute indépendance. Je n'ai jamais donné de consignes à mes journalistes" sur le traitement de Vivendi. 

Quand on lui demande si l'hebdomadaire a traité des problèmes de dette du groupe, Denis Jeambar assure que oui: "ce n'était pas nécessairement [des articles] critiques, cela rendait compte de la situation". 

Reste que ce témoignange intrigue l'assistance, qui ne voit pas le rapport avec les débats très techniques qui se tiennent depuis deux semaines. Un spectateur suppose: "visiblement, Messier a toujours un compte à régler avec Le Monde plus de dix ans après...".  


Source: Jamal Henni 
Le 13/11/2013 à 13:17
photo: Jean-Marie Messier et Pierre Lescure fin 2000. (Reuters)

Une QPC prolonge le procès en appel de Jean-Marie Messier jusqu'en avril 2014

Une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) va contraindre la cour d'appel de Paris à prolonger le procès de Jean-Marie Messier jusqu'au 9 avril 2014, a indiqué mercredi à l'AFP un avocat des parties civiles, Me Frédérik-Karel Canoy.




Une QPC soumise à la cour durant le procès par une partie civile est sensiblement la même qu'une autre QPC, qui a été transmise par la cour de cassation au Conseil constitutionnel le 8 novembre. Elle porte sur l'impossibilité pour une partie civile de faire appel d'un jugement au pénal si le parquet n'a pas lui-même fait appel préalablement.

A l'issue du procès de première instance, M. Messier a été relaxé du chef de manipulation de cours. Les parties civiles n'ont pu faire appel de cette décision, le ministère public n'étant pas lui même appelant.

Lorsqu'une QPC soumise à une juridiction porte sur les mêmes textes qu'une autre déjà transmise, le tribunal concerné doit attendre la décision du Conseil constitutionnel pour juger.

De ce fait, la cour d'appel a prévu deux nouvelles audiences, les 8 et 9 avril 2014, pour revenir sur les faits de manipulation de cours à la lumière de la décision du Conseil constitutionnel, et rendra sa décision sur l'ensemble des faits examinés le 29 avril, a indiqué mercredi, à l'audience, la présidenteMireille Filippini.

Les autres éléments retenus contre M. Messier, l'ancien directeur financier,Guillaume Hannezo, et l'ancien vice-président, Edgar Bronfman, qui constituent pour l'instant les seuls dont a été saisis la cour, seront eux examinés conformément au calendrier prévu initialement, jusqu'au 27 novembre.

Source: AFP

mercredi 13 novembre 2013

Vivendi : Messier au secours de la justice malgré lui

Le procès en appel de la déroute boursière de Vivendi voit les parties civiles tenter une manœuvre audacieuse.



Malgré un mémorable réquisitoire de non-lieu général de la vice-proc’ Chantal de Leiris le 19 janvier 2009, (cf. dossier Vivendi : quand non-lieu rime avec laborieux – Bakchich du 26/02/2009) la fine équipe présumée responsable aux yeux des actionnaires, de la déroute boursière de Vivendi, à savoir Messier, Hannezo, Licoys, Blondet, Dupont-Lhotelain, Guez et Edgar Bronfman Jr, voire même d’en avoir personnellement tiré parti pour certains d’entre eux, avait tout de même écopé d’une petite punition.

Entre la diffusion d’informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d’un émetteur (de titres), les abus de biens sociaux, voire les délits d’initié, écarts de conduite finalement retenus à leur encontre en 2009, il est vrai que le procès en appel pouvait toujours leur réserver quelques menus désagréments.

Echaudés par ce qu’ils tiennent pour un simulacre de justice en 2009, des parties civiles représentées par Maître Canoy alias « Columbo » dont nous avons souvent vanté les exploits dans ces colonnes, associé pour la circonstance à son confrère l’excellent juriste François Danglehant, ont donc pris le taureau par les cornes en développant une manœuvre d’encerclement.
L’opération à pris la forme d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) « en deux branches » déposée devant la Cour le 5 novembre.

En clair et à la lumière de ce qui s’est passé en première instance où le parquet s’était manifestement donné pour tâche d’absoudre les accusés, les parties civiles constatent que l’article 497 du Code de Procédure Pénale les a privé de la possibilité de faire appel de la décision de relaxe prononcée en faveur des mis en cause, notamment sur les délits présumés de manipulation de cours et de présentation de faux bilan. 

Elles considèrent donc que ledit article institue un régime juridique discriminatoire à leur détriment, en ne leur donnant pas la possibilité de faire appel d’une décision pénale. 



Source: Bakchich»société»Vivendi : Messier au secours de la justice malgré lui
lun, 11/11/2013 - 15:45