lundi 25 novembre 2013

Vingt mois avec sursis demandés pour Jean-Marie Messier

PARIS (Reuters) - Le parquet général a demandé mercredi la condamnation en appel de Jean-Marie Messier pour des délits présumés à la tête son ex-société Vivendi Universal, alors que le ministère public avait demandé la relaxe en première instance.
L'avocat général, Mireille Venet, a proposé vingt mois de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende à l'encontre de l'ex-icône du capitalisme français, une peine inférieure à sa condamnation lors du premier procès.
En 2011, Jean-Marie Messier avait été condamné à trois ans de prison avec sursis et 150.000 euros d'amende pour "diffusion d'informations fausses ou trompeuses aux marchés" entre 2000 et 2002 et "abus de biens sociaux".
Il avait transformé entre 1996 et 2002 la Compagnie générale des eaux en géant mondial de la communication, avec notamment le rachat de Canal+ et du groupe canadien Seagram, qui contrôlait le studio de cinéma Universal.
Etranglé par les dettes et les pertes, le groupe a ensuite été contraint à une lourde restructuration.
En première instance, les juges avaient qualifié Jean-Marie Messier de "prestidigitateur de dettes", considérant qu'il avait trompé le public et les actionnaires sur l'état du groupe dont il disait qu'il allait "mieux que bien" alors que les créanciers étaient à ses portes.
Ils avaient également retenu contre lui sa tentative d'obtenir sans l'avis préalable du conseil d'administration un parachute doré de 18,6 millions d'euros qualifié d'"abus de biens social".
PARACHUTE DORÉ
Devant la cour d'appel, l'avocat général, qui ne pouvait requérir, le parquet n'ayant pas fait appel, a proposé, outre la condamnation de Jean-Marie Messier, celle de deux anciens dirigeants pour délit d'initié.
Pour Guillaume Hannezo, ex-directeur financier, Mireille Venet a demandé une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis, contre 15 mois prononcés en première instance, et la confirmation de l'amende de 850.000 euros.
Elle a suggéré pour Edgar Bronfman Jr, alors directeur de Warner Music, une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis et la confirmation de l'amende de 5 millions d'euros.
L'avocat général a d'abord reproché à Jean-Marie Messier son "parachute doré", à savoir l'indemnité de 18,6 millions d'euros qu'il avait négociée lors de son départ, bien qu'il ne l'ait en définitive pas touchée.
"Cette convention de fin de contrat a été conclue de mauvaise foi par Jean-Marie Messier, à des fins personnelles, et en sachant qu'elle était contraire à l'intérêt social de VU eu égard à sa situation financière", a-t-elle dit.
Concernant la communication trompeuse, Mireille Venet a seulement retenu contre l'ancien dirigeant un entretien aux Echos en date du 11 décembre 2000 et un communiqué de Vivendi Universal du 19 décembre de la même année.
LES PETITS PORTEURS, "DINDONS DE LA FARCE"
Il y présentait alors le groupe comme net de dettes au 1er janvier 2001 pour ses activités médias et communication.
"Dire que le groupe sera net de dettes au 1er janvier 2001 alors que l'endettement de la branche communications était de 12 milliards d'euros et de 27 milliards pour le groupe est faux", a-t-elle dit.
Les défenseurs de petits porteurs, parties civiles, avaient auparavant demandé mardi la confirmation de la condamnation de Jean-Marie Messier et une indemnisation bien supérieure aux 10 euros accordés par action en première instance, soit 1,2 million d'euros au total.
"Les petits porteurs sont les dindons de la farce du début jusqu'à la fin", a plaidé Me Frédérik-Karel Canoy, représentant des actionnaires individuels.
L'avocat a estimé qu'il s'agissait de la plus grosse faillite jamais enregistrée en France, "un crash financier de 160 milliards d'euros qui a fait un million de victimes".
Il a rappelé que l'action Vivendi, qui était au plus haut du temps de Jean-Marie Messier, à près de 150 euros, était tombée à 8 euros à son départ. Elle vaut aujourd'hui moins de 19 euros.
Frédérik-Karel Canoy a en outre demandé que la société Vivendi, qui est partie civile, soit condamnée civilement en dommages et intérêts.
"La chute du cours a eu des conséquences préjudiciables pour les petits actionnaires, certains ayant placé toutes leurs économies" en actions Vivendi, a-t-il dit.
L'avocat s'appuie sur la sanction infligée au groupe par la commission des sanctions pour manquements et sa condamnation définitive en appel. La cour se prononcera sur ce point dans son jugement.
Edité par Yves Clarisse, nouvelle obs

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