vendredi 3 octobre 2014

"Le "procès EADS" en cinq questions "




"Le « procès EADS » doit s'ouvrir vendredi 3 octobre à Paris. Par « procès EADS » il faut entendre un procès pour soupçon de délit d'initiés qui vise sept cadres ou ex-cadres dirigeants du groupe européen d'aéronautique et dedéfense et de sa filiale, le constructeur d'avions Airbus, ainsi que les sociétés Lagardère SCA et Daimler AG, actionnaires d'EADS à l'époque des faits, en 2005 et 2006.
  • Qui attaque et qui comparaît ?
  • Quel est l'objet de cette affaire ?
  • Qu'ont fait les prévenus à l'époque des faits ?
  • Quelle peine encourent les prévenus ?
  • Pourquoi une autre enquête, celle de l'AMF, n'a-t-elle pas inquiété les personnes visées ?
Ce sont deux petits actionnaires et la Caisse des dépôts qui se sont constitués partie civile.
Sept personnes comparaissent devant le tribunal correctionnel :  côté EADS, l'ancien coprésident du groupe, Noël Forgeard, l'ancien numéro deux, Jean-Paul Gut, et le directeur financier de l'époque Andreas Sperl; côté Airbus, l'actuel directeur commercial, John Leahy, Erik Pillet, ancien directeur des ressources humaines, Alain Flourens et Olivier Andriès.
MM. Leahy, Flourens et Sperl travaillent toujours dans Airbus Group, le nouveau nom adopté par EADS.
Les sociétés Lagardère SCA et Daimler AG, en tant que personnes morales, comparaissent également.
La justice reproche aux prévenus de s'être enrichis indûment en vendant leurs stock-options, principalement en novembre 2005 et mars 2006, alors qu'ils avaient eu connaissance d'informations privilégiées, précises et confidentielles de nature à influer sur le cours de l'action EADS.
En l'occurrence, les intéressés savaient que le très gros porteur d'Airbus, l'A380, connaissait d'importants retards de livraison, qu'il fallait revoir complètement leprojet de long-courrier A350 et que les perspectives financières du groupe s'annonçaient du coup plus mauvaises que prévu.
L'A380 a été affecté par un problème de fabrication lié à un problème de câblages électriques (un seul A380 sera livré à la date prévue) et le programme de l'A350, jugé peu novateur par les clients, a subi de profondes modifications.
Ces difficultés ont entraîné des pénalités de retard dues aux clients, une augmentation des coûts de fabrication des avions et un manque à gagner avec des ventes retardées.
Quand ces différentes informations ont été annoncées publiquement, en juin 2006, le cours de l'action EADS chute : le 14 juin 2006, il perd plus de 26 %, soit 5,5 milliards d'euros.
Ces dirigeants sont accusés d'avoir exercé leurs options alors qu'ils avaient connaissance des difficultés des programmes de l'A380 et de l'A350, du souhait de Lagardère et de Daimler de se désengager partiellement du capital d'EADS (réalisé le 4 avril 2006), des retards de livraison et des prévisions financières défavorables pour le géant de l'aéronautique.
Avant l'annonce publique des ces différents éléments, quelque 11 millions de titres ont été cédés sur le marché par 1 172 dirigeants et salariés du groupe entre le 1er mai 2005 et le 13 juin 2006, alors que le cours était encore haut.
M. Forgeard a vendu 360 000 actions, MM. Gut et Leahy 175 000 actions chacun.
S'agissant de M. Forgeard, le juge estime qu'il existe des charges suffisantes contre lui pour « avoir le 9 mars et le 15 mars 2006 cédé 360 000 actions d'EADS » en ayant eu à sa disposition des « informations privilégiées sur les perspectives et la situation de la société EADS (…) avant que le public en ait connaissance ».
Les deux sociétés actionnaires, Lagardère et Daimler, se sont séparés le 4 avril 2006 de 7,5 % du capital chacun pour un montant total de 4 milliards d'euros. Elles se voient reprocher d'avoir vendu plus de 61 millions d'actions chacun, tout en étant détentrices grâce à leurs représentants dans les organes de surveillance et de direction « d'informations privilégiées ».
Les plus-value réalisées ont été importantes. Dans le cas de M. Forgeard, elle a été de 3,7 millions d'euros en 2006.
Les prévenus contestent avoir usé d'informations privilégiées pour s'enrichir, affirmant n'avoir découvert qu'après la vente de leurs actions l'ampleur des difficultés de programmes que le groupe pensait pouvoir maîtriser avec un retard acceptable.
Le délit d'initié est passible de deux ans de prison et d'une amende pouvantaller jusqu'à dix fois le montant du profit réalisé.
Deux enquêtes pour délit d'initié ont été menées, l'une administrative par l'Autorité des marchés financiers (AMF), ouverte le 22 mai 2006, l'autre pénale, le Parquet de Paris ayant ouvert une information judiciaire contre X le 23 novembre 2006.
Le rapporteur de la Commission des sanctions de l'AMF a certes préconisé desanctionner sept personnes sur les 17 qui étaient mises en cause au départ et d'imposer  700 000 euros d'amende à l'encontre d'EADS qui, selon lui, n'a pas communiqué « dès que possible » au marché l'information sur les retards de l'A380.Il a en revanche mis hors de cause Daimler et Lagardère.
Mais, au final, la commission des sanctions de l'AMF a considéré que les informations en possession des prévenus n'étaient pas suffisamment précises pour qualifier un délit d'initié et les a mis hors de cause fin 2009.
Lire aussi : Trois ans d'une enquête hors normes
Cette décision de la commission des sanctions de l'AMF, qui est un organe indépendant, distinct du collège qui mène notamment les enquêtes, avait été controversée et très commentée.
Elle a conduit à donner à l'AMF la possibilité de faire appel de la décision de la Commission des sanctions."

Article écrit par l'AFP avec Le monde poublié le 01 Octobre 2014 : 


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