PARIS (Reuters) - Jean-Marie Messier,
condamné en première instance pour des délits présumés au moment des
déboires de son ex-société Vivendi Universal en 2002,
tentera de laver son honneur
lors de son procès en appel qui s'est ouvert lundi à Paris. Il devra cependant
compter avec près de 200 petits actionnaires qui avaient obtenu
en première instance une
indemnisation globale de
1,2 million d'euros et
batailleront pour obtenir cette fois un montant très supérieur.
Une première passe d'armes a eu lieu dès
lundi
entre les avocats de la société
et
Me Frédérik-Karel Canoy,
défenseur d'actionnaires individuels, qui qualifie "d'aberration
juridique"
que Vivendi soit partie civile. Le
procès fleuve de l'ancienne icône du capitalisme français, reconverti à 58
ans en banquier d'affaires, doit durer six semaines. L'ex-président
de Vivendi Universal avait été condamné en janvier 2011 à trois ans de
prison avec sursis et 150.000 euros d'amende pour "diffusion
d'informations fausses ou trompeuses" et "abus de bien
social".
Ce jugement était allé à l'encontre
de l'avis du parquet, qui avait réclamé sa relaxe.
La première journée d'audience a été
marquée par des demandes de nullité et le dépôt par l'un des six anciens
dirigeants jugés en même temps que Jean-Marie Messier, d'une question prioritaire
de constitutionnalité (QPC).
LES PETITS PORTEURS COMBATIFS
Les avocats d'Edgar Bronfman,
directeur général de Warner Music à l'époque et condamné à 15 mois de
prison avec sursis et cinq millions d'euros d'amende pour délit d'initié, ont
plaidé le manque de clarté des textes français sur la question.
La cour rendra sa décision sur cette
demande de QPC mardi.
Jean-Marie Messier avait transformé
entre 1996 et 2002 la Compagnie générale des eaux en éphémère géant mondial
de la communication, avec notamment le rachat de Canal+ et du groupe
canadien Seagram, qui contrôlait le studio de cinéma Universal. Etranglé
par les dettes et les pertes, le groupe a ensuite été contraint à une
lourde restructuration.
Ce n'est toutefois pas sa gestion qui
est en cause, mais sa communication publique, qui aurait donné une image
erronée de la situation du groupe.
Les juges, qui l'ont qualifié de
"prestidigitateur de dettes", ont considéré qu'il avait trompé pendant
ses deux dernières années de gestion le public et les actionnaires sur l'état
de la société alors que les créanciers étaient à ses portes.
Ils ont aussi retenu contre lui sa
tentative d'obtenir sans l'avis préalable du conseil d'administration un
parachute doré de 18,6 millions d'euros qualifié d'"abus de biens
social".
Le tribunal a ordonné parallèlement
l'indemnisation de dizaines de petits actionnaires, pour un total de 1,2
million d'euros.
"CHICANERIES"
Me Frédérik-Karel Canoy a annoncé qu'il réclamerait 160 euros par action, comme en
première instance, plus 10 euros pour préjudice moral, alors que le
tribunal
correctionnel n'avait accordé que 10
euros aux petits actionnaires.
"Dix euros, ce n'était pas la
réparation intégrale du préjudice", a dit l'avocat à Reuters,
soulignant que l'action Vivendi, qui
était au plus haut du temps de Jean-Marie Messier,
à près de 150 euros, est tombée à 8
euros à son départ et évolue aujourd'hui
à moins de 19 euros.
L'avocat, qui multiplie les
procédures pour faire reconnaître la responsabilité de Vivendi, a cité le
groupe à comparaître pour qu'il soit condamné civilement en dommages et
intérêts.
Il s'appuie sur un arrêt définitif de
novembre 2009 de la cour d'appel, après renvoi par la cour de cassation,
reconnaissant Vivendi coupable d'avoir trompé le public et surpris la confiance
des marchés.
L'un des défenseurs du groupe de
communication, Olivier Baratelli, a plaidé que "Me Canoy et ses
quarante porteurs", n'avaient pas respecté le délai de dix jours pour
déposer une telle citation.
Il a reproché à son confrère de
multiplier les "chicaneries" depuis dix ans contre Vivendi à
seules fins de faire parler de lui. La cour d'appel ne se prononcera sur
le fait de savoir si Vivendi peut être condamné civilement que dans
son jugement, qui ne devrait pas être rendu avant cinq mois.
Gérard Bon, édité par Yves Clarisse
Source: RMC
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