Jérôme Kerviel n'est ni le Robin des Bois que certains ont voulu voir en lui au moment de la découverte de la fraude à la Société générale, ni la blanche victime, comme il a tenté de se présenter lors de son procès en juin. Le tribunal correctionnel de Paris risque pourtant de le transformer en victime expiatoire broyée par le monde fou de la finance, tant elle vient de rendre un jugement hallucinant
(le jugement -73 pages- peut être lu dans son intégralité en cliquant ici:
http://www.mediapart.fr/files/kerviel-delibere-pressewpd.1286270254.pdf
Jérôme Kerviel, selon le tribunal correctionnel de Paris, est coupable de tout, d'abus de confiance, d'intrusion frauduleuse dans un système informatique, de faux et d'usage de faux. La Société générale n'est responsable de rien, ni de ses défaillances et dérives internes, ni de l'absence de contrôle, ni de la non prise en compte des avertissements multiples.
Ces attendus aboutissent à un invraisemblable verdict au détriment de l'ancien trader de la Société générale, qui a annoncé son intention de faire appel: trois ans de prison ferme et surtout 4,9 milliards d'euros de dommages et intérêts – soit la somme qu'a perdue la banque en liquidant dans la panique les positions de l'ancien trader entre le 18 et le 23 janvier 2008. L'extravagance des montants demandés en dommages et intérêts prouve à rebours la peur qu'a provoquée Jérôme Kerviel à la Société générale et au sommet de l'Etat. Il fallait lui faire payer cela.
Jamais de tels dommages n'ont été réclamés en France. Serait-on passé, sans le dire, au système judiciaire américain, où les coupables se voient condamnés à 150 ans de prison ou plus? A titre de comparaison, le trader Nick Leeson, qui avait spéculé frauduleusement sur les marchés boursiers asiatiques, avait été condamné à six ans de prison et 70.000 livres sterlings d'amende (environ 80.000 euros). Ses spéculations frauduleuses avaient conduit sa banque, la Barings, à la faillite.
Qu'espère la justice en rendant un tel verdict : redorer la réputation de la Société générale, dissuader toute autre fraude sur les marchés? La démesure même de la condamnation la rend sans portée. A moins de devenir milliardaire comme Warren Buffet ou escroc comme Bernard Madoff, une vie de travail ne peut suffire à rembourser de tels montants, sauf à supposer que la sanction s'applique sur des générations de Kerviel. A moins que ce verdict, qui absout la banque de toute faute, ne lui permette de faire jouer quelques clauses de contrat d'assurances en vue de rentrer partiellement dans ses fonds?
Tout cela ne peut que jeter la suspicion sur les attendus retenus par le tribunal correctionnel de Paris, tant son jugement est à sens unique. Il ne s'agissait pas pour elle de faire le procès d'un système financier, avait prévenu le tribunal au moment du procès. Mais cela aurait pu, malgré tout, l'amener à s'interroger sur certaines pratiques. Jamais, semble-t-il, le tribunal ne s'est posé de question sur le climat et l'état d'esprit qui régnaient dans les salles de marché de la Société générale, où l'appât du gain semblait être la seule ligne de conduite.
Elle n'a pas retenu non plus les défaillances multiples des contrôles, l'aveuglement des supérieurs de Jérôme Kerviel sur ses gains. «Les éléments indiqués par la défense ne permettent pas de déduire que la Société générale ait eu connaissance des activités frauduleuses de Jérôme Kerviel», a tranché le tribunal. Il y avait eu 70 alertes ignorées par le contrôle interne et des appels répétés de la Bourse de Francfort. Et le tribunal poursuit: «Le dossier ne permet pas de déduire que la Société générale connaissait les activités de Kerviel ou a pu le suspecter.»
Condamnée par la commission bancaire, blanchie par la justice
Les rapports d'audit réalisés au printemps 2008 dans la banque n'étaient pas aussi complaisants. L'un d'eux écrivait ainsi: «Même s'il n'est pas exclusif d'un contrôle indépendant, le premier niveau d'un contrôle efficient reste le suivi managérial. Au niveau de l'équipe Delta One (le pôle où travaillait Jérôme Kerviel), il s'est montré défaillant tant en matière de supervision de l'activité qu'en matière de gestion des hommes. Ainsi, la hiérarchie du trader n'a pas effectué les diligences nécessaires qui auraient consisté à exploiter les états existants (états de position, de valorisation, de suivi de résultat ou encore de trésorerie) et qui auraient pu lui permettre d'identifier la véritable nature de l'activité du trader. Le développement des activités de Delta One et la croissance significative de ses résultats se sont accompagnés par l'apparition de pratiques non autorisées telles que des dépassements fréquents de limites de risque de marché, ou encore le lissage ou le transfert de résultat entre traders.»
La Commission bancaire notait de son côté à la suite de son enquête : «Il ressort de l'instruction que de graves défaillances ont eu lieu dans le suivi et le contrôle de premier niveau hiérarchique de l'opérateur.» L'autorité bancaire avait condamné la Société générale à payer 4 millions d'euros d'amende pour manquement, à la suite de l'affaire Kerviel. Avec les Caisses d'épargne, c'est la plus grave peine jamais prononcée par les autorités de surveillance en France. Comment, après une telle sanction administrative, la justice peut-elle totalement exonérer pour les mêmes faits la Société générale?
4 millions contre 4,9 milliards d'euros. La disproportion des sanctions est si caricaturale qu'elle ne peut qu'alimenter les critiques, exciter encore les reproches. Comment ne pas parler d'autre chose que de justice de classe, défendant sans nuance, sans équilibre, un système qui a pourtant prouvé ses manquements et ses failles? Dans quelques jours, le tribunal doit se prononcer sur une autre affaire: la faillite de Vivendi et la responsabilité de Jean-Marie Messier. On attend avec intérêt son jugement.
05 Octobre 2010 Par Martine Orange source médiapart
mercredi 6 octobre 2010
mardi 5 octobre 2010
lundi 4 octobre 2010
L'Oréal : nouvelle plainte sur le contrat avec Banier Contrairement à la première plainte, déposée contre X, celle-ci vise nommément Liliane Bettencourt et le président du groupe Lindsay Owen-Jones.
Nouvelle plainte sur le contrat qui liait L'Oréal au photographe François-Marie Banier, accusé d'abus de faiblesse sur Liliane Bettencourt, l'héritière du groupe de cosmétiques. L'avocat Frédéric-Karel Canoy a annoncé à l'AFP, jeudi 30 septembre, qu'un actionnaire de L'Oréal avait porté plainte à Paris contre la milliardaire et le conseil d'administration du groupe, Lindsay Owen-Jones, pour abus de biens sociaux.
"L'argent octroyé à M. Banier ne correspond pas à une prestation réelle et va à l'encontre de l'intérêt social de L'Oréal", a dit l'avocat, confirmant une information de RTL. Cette plainte a été déposée par Janez Mercun, qui fut pendant 25 ans distributeur de produits L'Oréal pour l'Europe de l'Est via sa société Temtrade installée en Suisse.
L'Oréal a récemment annoncé avoir rompu les contrats le liant à Héricy, la société de François-Marie Banier, en raison du "bruit médiatique" autour de l'affaire Bettencourt qui rendait la poursuite de ces contrats "préjudiciable à L'Oréal". Ceux-ci garantissaient le versement chaque année de plus de 700.000 euros.
Dans une interview au Point jeudi, Lindsay Owen-Jones confirme que François-Marie Banier a été "recommandé par M. ou Mme Bettencourt", il assure: "Il est évident que cela faisait plaisir à Mme Bettencourt. De là à parler de contrats de complaisance, il y a un monde".
(Challenges.fr, avec AFP)
"L'argent octroyé à M. Banier ne correspond pas à une prestation réelle et va à l'encontre de l'intérêt social de L'Oréal", a dit l'avocat, confirmant une information de RTL. Cette plainte a été déposée par Janez Mercun, qui fut pendant 25 ans distributeur de produits L'Oréal pour l'Europe de l'Est via sa société Temtrade installée en Suisse.
"Bruit médiatique"
Une première plainte a déjà été déposée contre X par le même avocat à Paris le 5 juillet, au nom d'un autre actionnaire, notamment pour abus de biens sociaux et visant les mêmes faits. Une enquête a été ouverte à la suite de cette première plainte, l'actionnaire soupçonnant François-Marie Banier d'avoir bénéficié d'un contrat de complaisance auprès de la société.L'Oréal a récemment annoncé avoir rompu les contrats le liant à Héricy, la société de François-Marie Banier, en raison du "bruit médiatique" autour de l'affaire Bettencourt qui rendait la poursuite de ces contrats "préjudiciable à L'Oréal". Ceux-ci garantissaient le versement chaque année de plus de 700.000 euros.
Dans une interview au Point jeudi, Lindsay Owen-Jones confirme que François-Marie Banier a été "recommandé par M. ou Mme Bettencourt", il assure: "Il est évident que cela faisait plaisir à Mme Bettencourt. De là à parler de contrats de complaisance, il y a un monde".
(Challenges.fr, avec AFP)
Me Frederik-Karel Canoy représente une vingtaine de contribuables parisiens
Jacques Chirac sera finalement jugé au printemps 2011 et non le mois prochain comme initialement envisagé, dans l'affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris, a tranché vendredi le tribunal correctionnel de Paris.
Le président de la 11e chambre, Dominique Pauthe, a fixé le procès du 7 mars au 8 avril, pour attendre la jonction éventuelle d'une procédure similaire en cours à Nanterre (Hauts-de-Seine).
La défense de Jacques Chirac aréitéré à l'audience sa demande d'un report par rapport aux dates initialement envisagées (8 novembre-8 décembre), afin que l'ex-chef de l'Etat soit jugé une seule fois s'il était également renvoyé devant un tribunal dans l'affaire de Nanterre.
L'un de ses avocats, Me Jean Veil, a fait valoir que le réquisitoire du parquet dans cette affaire était attendu "dans un très bref délai".
Dans l'hypothèse où le juge d'instruction de Nanterre Jacques Gazeaux déciderait ensuite d'un renvoi, il paraît "tout à fait logique" que ces "deux dossiers de même nature" soient "examinés en même temps", a renchéri Me Georges Kiejman devant la presse.
Les conseils de l'ancien président de la République ont reçu le renfort du ministère public. Son représentant, François Foulon, a en outre avancé que le "retentissement médiatique évident" de ce procès nécessitait des aménagements de salle ne pouvant être effectués en un mois, suscitant des sourires dans l'assistance.
En l'absence d'opposition, Dominique Pauthe a opté pour un report, fixant les dates en fonction des engagements des avocats des autres prévenus (procès de l'Angolagate en début d'année, Colonna à partir de mai).
En mars, il avait pourtant précisé que le procès devrait avoir lieu au plus tard "en février" 2011.
Redevenu justiciable ordinaire depuis la fin de son mandat à l'Elysée, Jacques Chirac, qui aura 78 ans le 29 novembre, est renvoyé devant la justice pour "détournement de fonds publics" et "abus de confiance" dans le dossier parisien, délits passibles de 10 ans de prison et 150.000 euros d'amende.
"J'espère que l'état de santé de M. Chirac lui permettra d'assister au procès, cela va de soi", a commenté Me Kiejman après l'audience.
Cette affaire, qui implique neuf autres prévenus, porte sur 21 emplois présumés de complaisance, rétribués sur fonds publics entre octobre 1992 et mai 1995, alors que Jacques Chirac était maire de Paris.
A Nanterre, c'est pour sept emplois fictifs que l'ancien président a été mis en examen, pour prise illégale d'intérêts.
Lundi, le Conseil de Paris avait voté un accord avec l'UMP et Jacques Chirac, indemnisant la ville à hauteur de 2,2 millions d'euros. En échange, la Mairie de Paris a informé le tribunal qu'elle retirait sa constitution de partie civile, a confirmé M. Pauthe.
Ce retrait allège considérablement la pression sur l'ancien président: sans victime principale, le procès s'annonce aussi sans accusation puisque le parquet avait requis un non lieu durant la procédure.
Deux avocats se sont toutefois présentés à l'audience en disant conseiller de nouveaux plaignants. Me Frederik-Karel Canoy a assuré représenter une vingtaine de contribuables parisiens mais n'a fourni qu'un seul nom, celui de Pierre Dac.
En entendant cet "homonyme d'un humoriste connu", Georges Kiejman n'a pu s'empêcher de pouffer: "Je m'attendais à un renvoi au 1er avril..."
L'association de lutte contre la corruption Anticor, dont le président d'honneur est le juge Eric Alphen, a pour sa part annoncé à l'AFP sa décision de se constituer partie civile.
Le président de la 11e chambre, Dominique Pauthe, a fixé le procès du 7 mars au 8 avril, pour attendre la jonction éventuelle d'une procédure similaire en cours à Nanterre (Hauts-de-Seine).
La défense de Jacques Chirac aréitéré à l'audience sa demande d'un report par rapport aux dates initialement envisagées (8 novembre-8 décembre), afin que l'ex-chef de l'Etat soit jugé une seule fois s'il était également renvoyé devant un tribunal dans l'affaire de Nanterre.
L'un de ses avocats, Me Jean Veil, a fait valoir que le réquisitoire du parquet dans cette affaire était attendu "dans un très bref délai".
Dans l'hypothèse où le juge d'instruction de Nanterre Jacques Gazeaux déciderait ensuite d'un renvoi, il paraît "tout à fait logique" que ces "deux dossiers de même nature" soient "examinés en même temps", a renchéri Me Georges Kiejman devant la presse.
Les conseils de l'ancien président de la République ont reçu le renfort du ministère public. Son représentant, François Foulon, a en outre avancé que le "retentissement médiatique évident" de ce procès nécessitait des aménagements de salle ne pouvant être effectués en un mois, suscitant des sourires dans l'assistance.
En l'absence d'opposition, Dominique Pauthe a opté pour un report, fixant les dates en fonction des engagements des avocats des autres prévenus (procès de l'Angolagate en début d'année, Colonna à partir de mai).
En mars, il avait pourtant précisé que le procès devrait avoir lieu au plus tard "en février" 2011.
Redevenu justiciable ordinaire depuis la fin de son mandat à l'Elysée, Jacques Chirac, qui aura 78 ans le 29 novembre, est renvoyé devant la justice pour "détournement de fonds publics" et "abus de confiance" dans le dossier parisien, délits passibles de 10 ans de prison et 150.000 euros d'amende.
"J'espère que l'état de santé de M. Chirac lui permettra d'assister au procès, cela va de soi", a commenté Me Kiejman après l'audience.
Cette affaire, qui implique neuf autres prévenus, porte sur 21 emplois présumés de complaisance, rétribués sur fonds publics entre octobre 1992 et mai 1995, alors que Jacques Chirac était maire de Paris.
A Nanterre, c'est pour sept emplois fictifs que l'ancien président a été mis en examen, pour prise illégale d'intérêts.
Lundi, le Conseil de Paris avait voté un accord avec l'UMP et Jacques Chirac, indemnisant la ville à hauteur de 2,2 millions d'euros. En échange, la Mairie de Paris a informé le tribunal qu'elle retirait sa constitution de partie civile, a confirmé M. Pauthe.
Ce retrait allège considérablement la pression sur l'ancien président: sans victime principale, le procès s'annonce aussi sans accusation puisque le parquet avait requis un non lieu durant la procédure.
Deux avocats se sont toutefois présentés à l'audience en disant conseiller de nouveaux plaignants. Me Frederik-Karel Canoy a assuré représenter une vingtaine de contribuables parisiens mais n'a fourni qu'un seul nom, celui de Pierre Dac.
En entendant cet "homonyme d'un humoriste connu", Georges Kiejman n'a pu s'empêcher de pouffer: "Je m'attendais à un renvoi au 1er avril..."
L'association de lutte contre la corruption Anticor, dont le président d'honneur est le juge Eric Alphen, a pour sa part annoncé à l'AFP sa décision de se constituer partie civile.
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