Ce "Warning Book" est une compilation de l'ensemble des messages de protestation concernant les comptes et la dette adressés par Guillaume Hannezo, ex-directeur financier deVivendi Universal, à Jean-Marie Messier, ex-PDG, sur la période de 2000 à la mi-2002. Deux autres avocats de la partie civile, MesPascal Lavisse et Frédérik Karel-Canoy, relaient immédiatement la demande de leur collègue.
MANIPULATION DE COURS
Le président Noël Miniconi, qui craint de ne pas tenir les délais, hésite : "On ne va pas refaire le procès", risque-t-il. Chantal de Leiris, procureure, affirme que "ce document est dans le procès et que les parties civiles ont eu tout le loisir de le demander".
Me Lavisse, avocat de l'Appac, une association de petits porteurs, précise que "la procédure pénale fait référence à cette pièce, mais en réalité personne ne l'a". Se tournant vers Chantal de Leiris, il ajoute : "Vous-même avez requis la relaxe de M. Messier sans avoir vu cette pièce capitale."
Une seule des parties civiles dispose du "Livre des alertes" et c'est Vivendi, présent sur le banc des accusés à New York. Me Hervé Pisani, avocat de Vivendi, dont la stratégie à Paris consiste à protéger le groupe en aidant Jean-Marie Messier, tente de noyer le poisson: "Ce document est largement connu de tous", argue-t-il. Prudent, il s'en "remet à la décision du tribunal".
Les avocats de MM. Messier et Hannezo se déchaînent : cette pièce nouvelle est un "happening" ou l'on ressert "les plats déjà servis". Me Pierre Haïk, avocat de M. Messier, suggère que l'on fournisse en sus "l'ensemble des réponses apportées par [son] client à New York". Mais avec les délais de traduction, le procès risque de prendre du retard. Le calme finit par revenir et Vivendi s'engage à apporter le document "dans les meilleurs délais".
Viennent ensuite les accusations de manipulation de cours. Vivendi a en effet procédé au rachat de 40 millions de ses propres titres fin septembre 2001. Ces transactions représentent plus du quart de la moyenne des opérations quotidiennes sur le titre Vivendi durant trois jours d'affilée et pulvérisent les limites de la réglementation. Pire, Jean-Marie Messier a ordonné des achats massifs le 25 septembre 2001, jour de la publication de ses résultats.
COMPTES MAQUILLÉS
Pour les parties civiles, ce soutien de cours contribue à l'endettement déjà inquiétant du groupe et sert à maquiller les comptes. Pour Jean-Marie Messier, ces achats s'expliquent par l'effondrement des cours consécutif "au 11 septembre 2001". "Les sociétés américaines étaient autorisées à racheter leurs titres sans limitation pour contrer les spéculations des hedge funds", justifie-t-il. Fidèle à sa stratégie de défense, M. Messier ajoute : "J'ai agi dans l'intérêt du groupe et huit ans après, je pense que la décision était bonne."
L'argumentation de M. Messier a reçu le soutien de Philippe Guez, ex-responsable de Deutsche Equity, filiale de Deutsche Bank, qui achetait et vendait pour le compte de Vivendi. Egalement mis en examen, M. Guez reconnaît avoir "noté l'agressivité des rachats de Vivendi", ainsi que le"franchissement de certaines règles". Il affirme avoir remonté l'information à son "compliant officer" (chef de la déontologie) qui tarde à répondre.
M.Guez reconnaît qu'il a volontairement "dramatisé" la situation en parlant d'"illégalités" et de risques de "prison". Il explique aujourd'hui avoir voulu faire acte de pédagogie vis-à-vis de son équipe d'opérateurs de marché à "qui je rappelle que la réglementation c'est la loi". Sur le fond, M. Guez conteste avoir participé à une "manipulation de cours". "Toutes les sociétés soutiennent leurs titres. J'ai agi dans le respect de la réglementation", a-t-il conclu.
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