La Tribune - 27/10/2009
Six personnes sont renvoyées devant le tribunal correctionnel. L'ex-PDG est accusé notamment de « manipulation de cours ».
SEPT ANS D'ENQUÊTE:
Les poursuites pénales contre Jean-Marie Messier ont été déclenchées par une plainte déposée en JUILLET 2002 par Maitre Frédérik-Karel Canoy, pour le compte d'un actionnaire.
En Janvier 2009, le parquet à requis un non-lieu général. Mais il n'a pas été suivi par le juge d'instruction Jean-Marie Huy qui a ordonné la semaine dernière le renvoi en correctionnelle, de cinq anciens dirigeants, ainsi que de Philippe Guez, Président de Deutsche Equities. De son côté, Vivendi s'était constitué partie civile en 2002. Mais Maitre Canoy indique, se référant à un cas similaire, l'Affaire Sidel, qu'il va faire citer Vivendi et Véolia devant le tribunal correctionnel, en demandant qu'ils soient condamnés solidairement avec les ex-dirigeants de Vivendi.
En effet ces sociétés sont aussi responsables des fausses déclarations de Messier, comme la cour d'appel de Paris, vient de la confirmer le 29 septembre.
Comme dans l'Affaire Sidel, les actionnaires de Vivendi peuvent demander des dommages en se constituant partie civile.
Sept ans après, Jean-Marie Messier (J2M) est rattrapé par son passé à la tête de Vivendi Universal (VU). À New York, il est poursuivi par des actionnaires mécontents dans une procédure collective (class action), où il va devoir témoigner prochainement. À Paris, il a reçu la semaine dernière une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, qui pourrait juger l'affaire dans les prochains mois. Parmi les multiples charges retenues contre J2M, la plus étayée est la « manipulation de cours ». L'ex-PDG est accusé d'avoir ordonné l'achat d'actions VU en violant les règles en vigueur.
Volumes d'actions
Petit retour en arrière, au 25 septembre 2001. Ce jour-là, à 15?h?16, VU publie ses résultats, tandis que Jean-Marie Messier les commente dans une conférence de presse. Entre 15?h?15 et 15?h?40, le cours passe de 48 à 50 euros. Puis, à une demi-heure de la clôture, le cours grimpe de 48,02 à 49 euros. Est-ce dû aux résultats annoncés par J2M ? Pas tout à fait. L'ordonnance de renvoi montre que c'est aussi le fruit d'un rachat massif d'actions effectué par VU. À 15h28, VU donne même l'ordre à sa société de Bourse, Deutsche Equities (filiale de la Deutsche Bank), de maintenir le cours à 50 euros pendant dix minutes.
Ce jour-là, ainsi que plusieurs autres jours de septembre et d'octobre 2001, VU n'a pas respecté la plupart des règles encadrant le rachat par une société de ses propres actions. D'abord, la quantité d'actions achetées est plafonnée à 25 % du volume moyen échangé les trois jours précédents. Or les achats de VU ont atteint jusqu'à 40 %. Surtout, il est interdit d'acheter des titres pendant les quinze jours précédent la publication de résultats, et, tous les autres jours, pendant la dernière demi-heure de la séance. Or J2M demandait de racheter des titres à la clôture lorsque « le niveau du cours ne correspondait pas à ce qu'il souhaitait », déclarera François Blondet, trésorier adjoint de VU.
Les documents saisis montrent que Deutsche Equities était conscient de franchir la ligne jaune. Son président, Philippe Guez, dit ainsi à un de ses supérieurs : « Moi, je ne veux pas aller en prison? Ils font n'importe quoi? Ils font des choses qui sont totalement illégales? » Il écrit à sa hiérarchie : « Je ne suis pas facilement troublé si un client agit à la limite de la légalité, mais, dans ce cas, cela me semble définitivement illégal. » Il envoie alors un courrier électronique à VU en demandant une lettre pour se couvrir. Mais VU refuse d'ouvrir l'e-mail et finira par envoyer cette lettre une semaine plus tard. Philippe Guez fait alors part de son soulagement : « On ne va pas en prison. »
Lors de l'instruction, J2M dira « porter seul la responsabilité » de ces achats, justifiés par « les circonstances exceptionnelles du 11 septembre 2001 ». Il assurera toutefois n'avoir jamais fixé d'objectif de cours à atteindre, mais donné un prix maximum d'achat. Son avocat, Me Olivier Metzner, ajoute que « ces rachats ont été effectués dans l'intérêt des actionnaires. De plus, le président de la COB [Commission des opérations de Bourse, devenue AMF, Ndlr], Michel Prada, et le directeur général de la COB, Gérard Rameix, ont déclaré à la brigade financière que, selon eux, il n'y a pas eu manipulation de cours ».
Rachats hors du cadre
Fin 2001, les services de la COB recommanderont d'ouvrir une enquête, mais Gérard Rameix décidera de n'en rien faire. Michel Prada enverra seulement une lettre déplorant que « certains rachats sont intervenus hors du cadre prévu par la COB ». Jean-Marie Messier répondra que le gendarme boursier américain, la SEC, avait, contrairement à la COB, levé toutes les contraintes sur les rachats d'actions, et que VU ne devait pas être désavantagée face à ses concurrents américains. « Il se fout un peu de nous », commentera le chef du service d'inspection de la COB en recevant cette réponse? Au final, Vivendi dépensera 1 milliard d'euros pour ses rachats d'actions entre le 17 septembre et le 2 octobre 2001. L'addition grimpe à près de 6 milliards si l'on étend la période jusqu'à début 2002.
Volumes d'actions
Petit retour en arrière, au 25 septembre 2001. Ce jour-là, à 15?h?16, VU publie ses résultats, tandis que Jean-Marie Messier les commente dans une conférence de presse. Entre 15?h?15 et 15?h?40, le cours passe de 48 à 50 euros. Puis, à une demi-heure de la clôture, le cours grimpe de 48,02 à 49 euros. Est-ce dû aux résultats annoncés par J2M ? Pas tout à fait. L'ordonnance de renvoi montre que c'est aussi le fruit d'un rachat massif d'actions effectué par VU. À 15h28, VU donne même l'ordre à sa société de Bourse, Deutsche Equities (filiale de la Deutsche Bank), de maintenir le cours à 50 euros pendant dix minutes.
Ce jour-là, ainsi que plusieurs autres jours de septembre et d'octobre 2001, VU n'a pas respecté la plupart des règles encadrant le rachat par une société de ses propres actions. D'abord, la quantité d'actions achetées est plafonnée à 25 % du volume moyen échangé les trois jours précédents. Or les achats de VU ont atteint jusqu'à 40 %. Surtout, il est interdit d'acheter des titres pendant les quinze jours précédent la publication de résultats, et, tous les autres jours, pendant la dernière demi-heure de la séance. Or J2M demandait de racheter des titres à la clôture lorsque « le niveau du cours ne correspondait pas à ce qu'il souhaitait », déclarera François Blondet, trésorier adjoint de VU.
Les documents saisis montrent que Deutsche Equities était conscient de franchir la ligne jaune. Son président, Philippe Guez, dit ainsi à un de ses supérieurs : « Moi, je ne veux pas aller en prison? Ils font n'importe quoi? Ils font des choses qui sont totalement illégales? » Il écrit à sa hiérarchie : « Je ne suis pas facilement troublé si un client agit à la limite de la légalité, mais, dans ce cas, cela me semble définitivement illégal. » Il envoie alors un courrier électronique à VU en demandant une lettre pour se couvrir. Mais VU refuse d'ouvrir l'e-mail et finira par envoyer cette lettre une semaine plus tard. Philippe Guez fait alors part de son soulagement : « On ne va pas en prison. »
Lors de l'instruction, J2M dira « porter seul la responsabilité » de ces achats, justifiés par « les circonstances exceptionnelles du 11 septembre 2001 ». Il assurera toutefois n'avoir jamais fixé d'objectif de cours à atteindre, mais donné un prix maximum d'achat. Son avocat, Me Olivier Metzner, ajoute que « ces rachats ont été effectués dans l'intérêt des actionnaires. De plus, le président de la COB [Commission des opérations de Bourse, devenue AMF, Ndlr], Michel Prada, et le directeur général de la COB, Gérard Rameix, ont déclaré à la brigade financière que, selon eux, il n'y a pas eu manipulation de cours ».
Rachats hors du cadre
Fin 2001, les services de la COB recommanderont d'ouvrir une enquête, mais Gérard Rameix décidera de n'en rien faire. Michel Prada enverra seulement une lettre déplorant que « certains rachats sont intervenus hors du cadre prévu par la COB ». Jean-Marie Messier répondra que le gendarme boursier américain, la SEC, avait, contrairement à la COB, levé toutes les contraintes sur les rachats d'actions, et que VU ne devait pas être désavantagée face à ses concurrents américains. « Il se fout un peu de nous », commentera le chef du service d'inspection de la COB en recevant cette réponse? Au final, Vivendi dépensera 1 milliard d'euros pour ses rachats d'actions entre le 17 septembre et le 2 octobre 2001. L'addition grimpe à près de 6 milliards si l'on étend la période jusqu'à début 2002.
Jamal Henni, source La tribune.
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