mardi 15 mars 2011

Procès Chirac : cela ne casse pas des barreaux de chaise


La vie de bâton de chaise, s'il faut en croire Arrêt sur images, gagnerait les membres des barreaux en goguette devant les caméras : le procès Chirac donne l'occasion de dire un peu tout, son contraire, voire n'importe quoi. Ainsi de Me Le Borgne qui s'en donne à cœur joie en montant l'opinion contre Jacques Chirac & consorts, suscitant un scandale là où il n'y a pas l'ombre d'un doute. Pourtant, comme c'est bizarre, François Bayrou, du MoDem, par exemple, exprime de sérieux doutes. Et il n'est pas le seul, de loin…

Selon Le Littré, un barreau serait aussi « tribunal de la conscience, for intérieur ». À l'appui, cette citation de Bayle : « Il y a bien des mensonges de préface qui passent pour des péchés véniels non seulement dans les barrreaux de la république des lettres, mais aussi dans les barreaux de l'Église. ». Sans nulle préface, Arrêt sur images entonne le canon. « Quel jeu de dupes, ce vrai-faux procès Chirac ! Qu'ils étaient émouvants dans les studios des émissions à la mode, ses avocats après le report, jurant, désolés, que l'ancien président était fin-prêt pour son procès, qu'il piaffait "dans les starting blocks." Mais à propos, pourquoi Chirac lui-même n'est-il pas venu solennellement au Palais de Justice exiger que se tienne son procès ? Peut-être aurait-il eu une chance de convaincre le juge qui, au dernier moment, a reculé, terrifié. Disons la vérité simplement: aucun puissant ne voulait de ce procès. Ni les hauts magistrats, ni la droite, ni la gauche. Personne, sauf les Français ! Mais la France est-elle encore une démocratie, ou désormais un syndicat de protection mutuelle de l'oligarchie ? ».
Voilà qui semble donner raison à Me Le Borgne qui, dans Le Monde, donc dans la presse, voit les médias créer des scandales et déboussoler l'opinion. Eh, dans ce cas, maître, ignorez donc définitivement la presse. De peur d'alimenter le scandale, par exemple. Elle vous le rendra bien.
L'association Anticor, partie civile, dont le bureau vient de rappeler son attachement à « la complémentarité entre les parties civiles », en ce procès comme dans d'autres, reprend ou précède, je ne sais, les réflexions de François Bayrou, du MoDem. Lequel estime que ce qui est visé, en fait, par la décision de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, c'est de faire revenir par la fenêtre les propositions d'Alliot-Marie, retoquées par la Cour de cassation : à savoir d'enterrer, en faisant jouer la prescription, toutes les affaires des années 2008 et antérieures. C'est un peu complexe, mais cela va très loin.
En son barreau, ici son for intérieur, Me Canoy n'est pas loin de penser que le but de la manoeuvre est de mettre au pas les sages de la Cour de cassation. Et de faire de cette vénérable institution, comme il l'exprime cette fois à haute voix, « une juridiction de second ordre » derrière un Conseil constitutionnel dont on sait de quelle manière, et par qui, il est composé. On peut s'en désintéresser.
On peut aussi en rire en se demandant à qui au juste Bayrou réserve la baffe qu'il semble vouloir donner sur le visuel ci-dessus. À moins qu'il ne menace d'une fessée. Mais qui donc ? La première ou le premier qui suggérerait le juge Pauthe ou ses deux assesseures friserait l'outrage à magistrats. Tout ne finit pas en France par des chansons, parfois, la Carmagnole précède le son du canon. Mais pour le moment, n'en déplaise à Me Le Borgne, cela reste bon enfant. J'en veux pour preuve cette strophe et ce refrain de « La Parisienne » :

Puisqu'il n'y a plus de Justice
Pensa le fantôme en colère
Il nous reste au moins les supplices
Et cette fois j'en fais mon affaire
On ne peut pas mentir tout le temps
Afin qu'au moins on s'en souvienne
Je condamne le Président
À prendre son bain dans la Seine…

Si tu nous entends Grand Papa
S'il te plaît revient vite on sait bien que c'est toi
Dans un ultime coup de démence
Qui a tiré sur l'ambulance
Mais où est passé Grand Papa ?
Mais où est passé Grand Papa ?
Cette fois il a fait
Pschitt et Abracadabra !


Dans l'acadrabadantesque, vous pouvez vous intéresser à la jurisprudence de la Cour de cassation et confronter avec les motivations du tribunal correctionnel de Paris, 11e chambre, 3e section. Nous nous sommes au moins penchés sur le premier terme : les sages pourraient flairer le piège.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Laissez vos impressions