jeudi 24 septembre 2009

Maître Frederik-Karel Canoy est l'avocat de l'Appac (Association des petits porteurs actifs), à l'origine de l'enquête sur les dirigeants de Vivendi Universal (VU). Il revient sur la mise en examen de Jean-Marie Messier et pointe d'autres responsabilités dans cette affaire tentaculaire. Interview.

tf1.fr : Que pensez-vous de la mise en examen de Jean-Marie Messier ?
Maître Canoy : C'est un bon début. Ce qui était vraisemblable est maintenant devenu réalité. Contrairement à ce que certains veulent faire croire, une mise en examen n'est pas une simple mesure technique. Durant deux ans, le juge a pris soin de vérifier un à un les faits qui lui ont été transmis. C'est maintenant chose faite. C'est une victoire pour notre association.
tf1.fr : Contrairement à certains de ses collaborateurs déjà mis en examen, une caution de 1.300 000 euros a été réclamée à l'ancien patron de VU…
On va enfin connaître la vérité sur sa fortune personnelle. Monsieur Messier est inspecteur des finances, il sait donc compter. Le 15 octobre 2003, devant les députés [la mission d'information sur la réforme du droit des sociétés, NDLR], il a assuré qu'il était ruiné. C'est le terme qu'il a utilisé à l'époque. Quand vous êtes ruiné, comment pouvez-vous payer un million de dollars d'amende aux Etats-Unis et une caution d' 1,3 millions d'euros en France ? De deux choses l'une : soit il s'est fichu du monde, soit il a dit vrai. Dans ce cas, il devrait être incapable de payer sa caution. 
Si d'aventure il trouve l'argent, il faudra bien sûr que les juges s'interrogent sur l'origine des fonds. Monsieur Messier a-t-il conservé de l'argent à gauche et à droite ? Nous en sommes convaincus. D'ailleurs, il fait actuellement l'objet d'une enquête de l'administration fiscale au sujet des plus-values réalisées lors de la vente de stock-options, plus-values qui apparemment n'ont pas été déclarées en France. L'ont-elles été aux Etats-Unis ? Mystère.
tf1.fr : Entre le 17 septembre et le 2 octobre 2001, Jean-Marie Messier a fait racheter 21 millions de titres de VU, une opération interdite par la réglementation boursière. Mais le patron de VU assure qu'après les attentats du 11 septembre, la SEC (le gendarme de la bourse aux Etats-Unis) a autorisé la dérégulation du marché. Il affirme avoir agi "dans l'intérêt des petits actionnaires".
Grande nouvelle, il est donc de notre côté ! Plus sérieusement, certes, il y a eu les événements du 11 septembre, mais y-a-t-il d'autres sociétés qui ont eu recours à de telles pratiques durant cette période ? Pour le moment, aucune ne l'a signalé. D'autres sociétés ont-elles bénéficié de la même mansuétude de la part de la COB ? [la Commission des opérations de bourse, NDLR]. Le 11 septembre n'est qu'un alibi : Messier savait pertinemment que sa société n'allait pas réaliser les résultats escomptés. Son équipe a falsifié les comptes. Elle a réalisé cette manipulation de cours pour tenter de parvenir à ses fins. Et Messier nous fait ensuite le coup de l'intérêt de l'entreprise ! Je crois surtout que c'était pour ses propres intérêts. Sinon, on n'en serait pas là.
La COB a également sa part de responsabilité. Il faut qu'elle assume ses actes. Au lieu de dilligenter une enquête sur cette manipulation de cours, elle a fermé les yeux si bien qu'il a fallu attendre le recours d'une association de petits porteurs pour que l'enquête commence. C'est scandaleux.
tf1.fr : Cinq personnes ont déjà été mises en examen dans cette affaire. Qu'attendez-vous de la suite de l'enquête ?
Les différentes banques qui ont soutenu VU sous l'ère Messier se sont immiscées dans la gestion de la société. Le résultat est catastrophique. L'Appac estime à 50 milliards d'euros le préjudice subi par les petits porteurs. J'attends donc que les banquiers viennent discuter avec l'association et indemnisent forfaitairement le million de petits porteurs que nous représentons.
Le conseil d'administration de Vivendi de l'époque devra également s'expliquer sur la fasification des deux procès-verbaux issus de la réunion du 3 juillet 2002 entérinant le départ de M. Messier. Lors d'une audience au tribunal de commerce, ils ont tous affirmé que ces PV ne correspondaient pas à la réalité. Ils étaient donc tous au courant et ils n'ont rien dit.

1 commentaire:

  1. Ex salarié de Vivendi, j'ai reçu en 1999 10 stock-options, dans le cadre d'un grand plan d'attribution de SO à 250 000 salariés du groupe. Ensuite l'action s'est effondrée et la branche dans laquelle je travaillais a été revendue à un fond d'investissement. Evidemment je n'ai jamais vu la couleur des SO.
    Cordialement
    Bruno

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